Montagne à vaches


(a) La montagne à vaches est la montagne pastorale, comme le Plateau d'Emparis, au-dessus de La Grave, en balcon face à la Meige.


(b) Pour l'alpiniste, la montagne <à vaches> est une montagne sans pics, sans falaises ni glaciers.


- <<La montagne à vaches : les zones d'alpages, où paissent les troupeaux (péjoratif dans la bouche des alpinistes)" (Le Petit Robert)>>.


(c) Références d'usage du terme :


- <<passage à vaches : désigne un passage facile dans une voie ou une course en montagne. "Y'a pas à dire, cette vire c'est un passage à vaches" (Alpinus, Lexique)>>.


- <<Le nom Basque Larroun «Larre on» (bon pâturage). Bien que n'entrant pas dans la cour des 1000 m, la Rhune reste un sommet qui se gagne. Cette montagne à vaches se voit de toutes les plages à cent kms à la ronde, inversement son panorama s'étend, rien que pour le versant Français, des Landes aux Pyrénées centrales. (Pyrène Randos, "La Rhune")>>.


- <<Tout cela a vraiment commencé en 1968, quand j'ai quitté Paris pour terminer mes études à Grenoble tout près de ma première maîtresse, la montagne. Et celle-là, je l'aime toujours, comme on garde toute sa vie dans un petit coin de son cœur une grande place pour son premier amour. Chaque week-end, toutes les vacances, quelle que soit la météo, j'étais sur la route. J'ai commencé par la montagne à vaches, puis il a fallu aller plus haut. Alors, j'ai découvert l'escalade et parfois, je séchais les cours pour aller gratonner à la Bastille ou dans les autres écoles de grimpe autour de Grenoble. Je n'ai jamais été un as, mais chaque week-end c'était une D ou une TD en Vercors, dans les Écrins ou ailleurs. J'allais oublier de parler du ski, ça a commencé par la piste, mais je me suis vite lassé des tire-culs et des files d'attente bruyantes et colorées – le bleu et le blanc c'est tellement beau ! Alors, le ski de randonnée m'a permis de parcourir tous les massifs que j'aimais en hiver et au printemps. (Site "Sentiers et Nature", Gérard Barré, "Première visite", vendredi 1er septembre 2006)>>.


(d) Références littéraires :


- "Réganel ou la montagne à vaches" est un roman de Roger Canac, guide de Haute Montagne (éditions Glénat, Collection Hommes et montagnes, novembre 1994).


- <<la montagne à vaches, c'est parfois la plus difficile (Bertrand Kempf, "Le Guide pratique de la Montagne", Flammarion, Paris)>>.


- <<Pour reprendre le fil de mon histoire, après cette parenthèse qui anticipe sur le calendrier, nous sommes en juillet 42. Je suis en possession de mes diplômes et dégagé de toute obligation militaire. Le départ pour l'Angleterre, voulu depuis deux ans, est, si l'on peut dire, à portée de main. Il m'est impossible de me souvenir les raisons qui font qu'il n'aura finalement eu lieu qu'au moment du débarquement des Alliés en Afrique du Nord au début de novembre 42. Sachant par les rumeurs que ce type d'expédition se terminait, dans la plupart des cas, en prison, je m'étais préparé physiquement en allant passer quinze jours en montagne. Chaque jour, je gravissais un nouveau sommet pour améliorer mon endurance et j'en profitais, le rationnement étant très sévère, pour me ravitailler en tomme de Savoie dans les fermes.

Imaginant que les nuits seraient froides dans les geôles espagnoles, et les couvertures rares, j'avais fait l'acquisition d'une canadienne. À ce jour, il s'agit probablement de l'acquisition la plus utile de mon existence. En cinq mois de prison, dont quatre en hiver, je n'ai jamais souffert du froid. Avec deux ou trois de mes amis, j'avais évoqué cette expédition, sous le sceau du secret. Les délateurs, en effet, foisonnaient. Le Père Fraysse, approché, m'avait donné un contact à Perpignan, là où les Pyrénées se transformant en montagne à vaches, leur traversée ne présentait aucune difficulté. Évidemment, le plus simple eût été de franchir la frontière au pays Basque, où je connaissais, pour les avoir empruntés dans nos promenades d'adolescents, une multitude de lieux de passage en Espagne. Cette région située en zone interdite étant gardée par des Allemands, la traversée eût été inutilement dangereuse. (Pierre Haas, "De la désolation à la victoire 1939-1945", éditions De Fallois, 1 er février 2007)>>.


- <<Jos n'avait jamais aimé les vacances. Il n'en supportait que les quatre ou cinq premiers jours. Après quoi l'ennui menaçait de l'engloutir. Claude le maintenait à la surface quatre ou cinq jours encore à force de marches en montagne (s'il y avait une montagne proche), d'invitations acceptées ou refusées (elle était seule à connaître l'économie qui présidait aux oui ou aux non, personne d'autre qu'elle ne sachant deviner si l'éditeur serait heureux ou harassé de voir ces gens-là.) Enfin elle cédait, et c'était le retour fièvreux vers Paris dans un désordre de réservations annulées, d'amis vexés, de billets perdus.

Quand elle le vit, chez Graziella, faire grise mine, elle lui proposa les Grisons, idéal remède à opposer à la chaleur et à la mer, de même que la canicule et la Méditerranée paraissaient, seules, pouvoir guérir Jos de la léthargie qui l'accablait après une semaine de sapins. «L'avion jusqu'à Milan. Là nous louons une voiture: nous serons à Sils trois heures plus tard...»

Le cardiologue, qui connaissait les habitudes des Fornerod, avait téléphoné à Jos :

«Plus d'altitude ni d'escalades, bien entendu...»

- Même la montagne à vaches ?

- Mille mètres, onze cents, pas plus, et des sentiers qui descendent...

(François Nourissier, "Le Bar de l'escadrille", éditions Grasset)>>.


- <<Les deux alpinistes cassent la croûte en devisant. Le camembert est bien coulant, le pain est croustillant, le vin est gouleyant. Albert sort de son sac, une petite bouteille de Genépy en déclarant : «J'ai confectionné moi-même cette liqueur de genépy. J'ai ramassé ces armoises cet été, au Bric Froid dans la vallée du Queyras qui est mon pays d'origine. Le Queyras, c'est mon berceau dans le village de Ristolas au bord du Guil, cette rivière capricieuse qui inonde régulièrement la vallée. C'est là qu'enfant je gardais les boeufs sur les flancs du Pelvas cette montagne à vaches, au lieu dit «Pierres écrites» où je passais des heures à déchiffrer ces signes cabalistiques gravés sur les rochers, un peu comme les gravures préhistoriques de la vallée des merveilles au pied du Mont Bégo dans le Mercantour. Je contais aussi fleurette à la bergère nubile. Je ramassais le foin que je transportais sur un char branlant jusqu'à la grange du village abandonné de Valpréveyre qui nous servait à la bergère et à moi de nid d'amour. Ma première ascension, ce fut le Bric Bouchet, mon premier trois mille, et je n'en menais pas large au passage délicat appelé le «passa cavalo» que l'on passe à cheval entre deux abîmes, tellement l'arête est étroite. J'allais au lycée d'Embrun au bord de la Durance, cette ville aux ancêtres vaudois, des hérétiques persécutés par l'église catholique et le roi. Mes aïeux du Queyras étaient des protestants que l'abrogation de l'édit de Nantes par Louis XIV avait obligés à la conversion à la religion catholique ou à l'exil, ils sont restés cependant en Queyras et ont conservé leur foi clandestinement jusqu'à la révolution. Les hivers sont rudes au pays et l'économie était impécunieuse, la plupart émigraient à Marseille, dans les commerces de fromages des alpes, jusqu'à ce que les sports d'hiver et le tourisme transforment la vallée en stations à la mode pour les classes moyennes du littoral maritime recherchant l'authenticité d'un pays loin des stations du ski industriel. J'ai fait l'école d'alpinisme de Chamonix avec comme professeur le célèbre marseillais Gaston Rebuffat, le héros de l'Anapurna. Je reviens régulièrement au pays, bien que ses sommets soient beaucoup moins exaltants que ceux du massif du mont blanc, pour des pèlerinages sur les traces de mes exploits d'adolescent et pour retrouver mes vieux parents qui ont abandonné l'élevage pour ouvrir un gîte d'étape de randonneurs et de ski de fond.» (Fernand Reymond, "Alpes, être et temps", nouvelle littéraire)>>.


(e) Locution. On dit volontiers <c'est à vaches>. Mais, quand ce n'est plus à vaches, il est important de <se vacher> ("s'attacher") à une corde.


- <<Quand c'est à vaches, c'est que c'est facile. "Cette ascension, c'est à vaches". (Abécédaire de la Montagne)>>.


- <<Assuré par le M et votre serviteur, le Big Matt ne tarde pas à trouver le point faible de la corniche : c'est "à vaches". Le plaisir de passer les chaussures en position descente, de se préparer pour l'action… et nous plongeons un à un dans le couloir, 1500m au dessus de la route du col d'Ornon, baignée d'un soleil presque printanier. Les 50 premiers mètres sont raides et justifient la cotation. La neige est profonde, peut-être un peu trop. Un passage d'arête et une accumulation potentiellement dangereuse nous mettent sur nos gardes, mais tout se passe bien et l'on peut se gaver de poudre dans une très belle ambiance. (Romain de Lambert, "La clé du paradis", Face Nord de la Rosière, Couloir Ouest du Petit Armet, 26 février 2006)>>.


- <<Je pensais : les temps changeaient, les esprits s'échauffaient... peut-être à cause des glaciers qui fondaient ; les temps changeaient sous des glaciers carrément remontés à Chamonix comme dans cette belle petite ville de St Gervais.

«Arrête Zian, tu vas trop vite !» Brigitte s'inquiétait de l'allure imposée par son amoureux de jeune et beau guide qui la faisait transpirer depuis la gare supérieure dite du Montenvers. «À ce train-là, je te jure... je pète une durite dans moins d'un quart d'heure mon p'tit Zian». Juste le temps qu'il fallait justement à la cordée pour rejoindre par un sentier scabreux, jugé carrément vertigineux par la fille du banquier parisien, un empilement d'échelles métalliques rivées à la roche permettant de rejoindre facilement les rives décharnées de la Mer de glace cent mètres en contre bas. «À vaches !» avait dit Zian. «À vaches... Tu parles !». Brigitte grommelait tout en essayant de se concentrer sur les dangereuses aspérités du chemin de biques accroché à l'abîme. «À vaches...» Zian, d'un coup, marqua franchement le pas, de façon à ce que sa cliente puisse le rejoindre d'assez près pour lui tomber littéralement dans les bras. «Mon Zian !» fit Brigitte en fermant les yeux, la tête blottie contre la poitrine rassurante de son «marronnier» (où l'on peut encore vérifier que les corps s'attirent grâce aux lois de la gravitation et d'autant plus dans la perspective d'un vide menaçant qui s'approche). (Tony alias J.L. Gantner, "L'Anti Mont-Blanc", parodie de "La Grande crevasse" et de "Retour à la montagne", de Roger Frison-Roche, dont les personnages centraux sont Zian Mappaz et Brigitte Collonges)>>.


- <<Au début de ce siècle, on vient uniquement l'été. Les visiteurs apprécient la beauté du site, les innombrables promenades de toutes difficultés, depuis le sentier "à vaches" jusqu'aux "courses" impressionnantes réservées aux gens "de sacs et de cordes", avec crampons et piolets... et guides chevronnés. On venait en famille. Les mamans s'installaient un mois six semaines avec les enfants pour toutes les grandes vacances. Les messieurs se passionnaient pour la géologie, la flore, les panoramas ? C'était le temps où le Club Alpin était une sorte de société scientifique assez fermée, pour amoureux de la Montagne qui avaient du temps devant eux. Après être venu queques années à l'hôtel (du Bonhomme) on cherchait un terrain à acheter pour construire. A l'époque, ce n'était pas par spéculation, ni pour placer son argent ; c'était parce qu'on appréciait le pays. Les Contamines se sont ainsi développées par des familles qui se sont attirées mutuellement, ce qui marque encore le caractère de la station : on y compte quelque quatre cent cinquante résidences secondaires. Comparativement aux chambres d'hôtel, ou de meublés, la proportion est très importante. ("Les ressources touristiques", document du web)>>.


(f) L'expression <sentier de chèvres> n'a pas du tout la même connotation péjorative.


- <<Pas de bon pauvre ! L'homme aux pieds en dehors et à la barbe blanche, qui fonctionne avec une vitesse de cinquante coups de chapeau à la minute, n'était plus là. J'aurais cru à tout, Mesdames et Messieurs, oui à tout, plutôt qu'à la disparition de ce bon pauvre ! Il me semblait faire partie intégrante du pont ! Ah ! pourquoi n'était-il pas là, à sa place habituelle ? Deux escaliers de pierre, à double révolution, remplaçaient maintenant les sentiers de chèvres qui, hier encore, donnaient accès aux jardins, et avec l'affluence du populaire qui les montait et les descendait, quelle recette ce bon pauvre eût réalisée ! (Jules Verne, "Une ville idéale")>>.


- <<Là nous nous consultâmes. La boussole dont nous étions munis nous disant clairement que nous étions dévoyés, force nous fut de rebrousser chemin. Un examen plus minutieux nous fit découvrir, non loin des mornes connus sous le nom d'Altos-Picachos, dans le flanc des collines basses mais accores placées à l'orient du ravin, un sentier de chèvres qui avait échappé à nos premières investigations. Il nous permit de gagner leur sommet. Dans le repli d'un étroit vallon qu'il traversait s'élevait une misérable hutte de berger ; malgré son apparence déserte, l'espoir d'y trouver de l'eau nous y poussa et il n'y avait point de serrure à forcer pour y pénétrer, mais elle ne contenait, hélas ! que quelques poteries ébréchées et poudreuses, aussi sèches que notre gosier. A la chute du jour, nous descendîmes dans une plaine que bordait la mer à notre droite ; le sentier se dirigeait vers la plage en serpentant à travers un triste chaparral émacié par la sécheresse, et ne rappelant à l'esprit, par ses teintes poudreuses, aucune idée de végétation. (Ernest Vigneaux, "Souvenirs d'un prisonnier de guerre au Mexique, 1854-1855", 1863)>>.


- <<Le crépuscule déjà tombait, lorsque enfin nous arrivâmes à "notre" plage, une petite plage en demi-lune située environ vingt-cinq mètres plus bas que la route, d'où on ne pouvait pas la voir. Un petit sentier de chèvres y conduisait ; la voiture fut parquée là où ce sentier commençait, et nous le dévalâmes vers le bas. (Jean-Pierre Fries, "En route", roman, éditions Le Manuscrit)>>.


- <<Un passage délicat, mais très bref, franchit un petit ravin, puis ce véritable sentier de chèvres (au sens propre) atteint le vaste replat herbeux du Challas. (Conseil Général des Alpes-Maritimes, Rando pédestre, "Corniches du Cians")>>.


- <<Commencez votre randonnée à l'embouchure du crique Sheaf, dans la vallée Deadmen. Vous devriez rester dans le lit du crique ou ne pas vous en éloigner et devrez traverser le crique à plusieurs reprises. Au début des années 1980, un important feu de forêt a causé la chute de nombreux arbres en travers du lit du crique, rendant cette partie du circuit lente et pénible. Suivez le crique jusqu'à l'endroit où il disparaît pratiquement à la base du plateau. Prenez la droite (ouest) et gravissez la crête abrupte qui mène au plateau. Cette crête escarpée et moussue aboutit à un talus d'éboulis; il faut être très prudent par temps humide. Près du sommet, il y a une petite terrasse et une falaise assez escarpée. À la droite de la falaise, un sentier de chèvres mène au sommet du plateau Tlogotsho. L'été, il n'est pas toujours possible de trouver de l'eau à haute altitude : apportez-en donc une bonne ration. Soyez prêt à affronter des conditions météorologiques extrêmes et à être surpris par des nuages bas pouvant apparaître soudainement, rendant la marche et l'orientation difficiles. (Parcs Canada, Réserve de parc national du Canada Nahanni, "Crique Sheaf - Plateau Tlogotsho")>>.


- <<Morgiou et Sormiou se ressemblent beaucoup : mêmes rives pierreuses en pente forte, tachetées par les touffes du maquis. Les bateaux mouillent à quelques mètres des rochers, une amarre tournée à terre car le rivage est partout très accore. La plupart des bateaux en escale restent à l'extérieur car la calanque offre un abri très sûr contre le mistral, le seul vent à redouter en ces parages. On aurait tort de limiter une visite du massif de Marseilleveyre à ces deux seules calanques. La calanque voisine de Sugiton est superbe ! Elle est inhabitée car difficilement accessible par un sentier de chèvre qui descend des hauteurs du massif. ("La voile en Méditerranée", document du web)>>.


(g) Opposition paradigmatique. A <montagne à vaches> s'oppose la locution <les grosses>, sous-entendu <courses en montagne>.


(h) On n'occupe la montagne à vaches que pendant le temps de l'estive. La montée à l'alpage et la descente depuis l'alpage est la remue d'alpage ou la transhumance.


(i) Voir Disparition de l'estive en jasseries. Estivareilles. Fourme. Jasseries. Moëntieu des Moussoux. Organisation paysanne de l'estive. Pottok. Rocher des Gaillands. Valcivières.




* * *


Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Lundi 11 Août 2008.



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