Groupe



(A) Généralités.



(a) Définitions rapides. Un groupe, terme de 1668, est :


- la "réunion d'un certain nombre de personnes" ;


- une "réunion d'objets formant un tout distinct : un groupe de maisons" ;


- groupe sanguin : "ensemble de caractéristiques antigéniques du sang, à partir desquelles on distingue les individus en vue notamment de la transfusion sanguine" ;


- terme de Biologie. Groupe de liaison : "ensemble des locus qui peuvent être reliés directement ou indirectement par liaisons factorielles. Les gènes ainsi groupés équivalent donc à un chromosome et sont transmis simultanément à la descendance. Le terme <linkage> ne doit pas être utilisé en français".


(b) Etymologie. L'italien <gruppo>, avec une variante <groppo>, signifiant "noeud", "assemblage", dérive du germanique <kruppa>.


(c) Références littéraires. Daté du XVII ème siècle, le mot <groupe> est néanmoins présent dans les formulations modernisées de Rutebeuf (1260) et de Chrétien de Troyes (1170). Mais il fait florès au XIX ème siècle :


- <<Si Noble savait ce qui est en cause,

et ce qui se raconte

à travers la ville,

- Madame Raimbour, Madame Poufile

en font le sujet de leurs palabres,

par groupes de dix ou de vingt,

et disent qu'on n'a jamais vu cela,

et qu'un noble coeur ne s'est jamais amusé

à ce genre de chose !

(Rutebeuf, "Poèmes de l'infortune", 1260, Le Retournement de Renart)>>.


- <<Elle sourit à son mari

et en souriant lui a dit : "Mon cher,

allez prendre l'air dehors

et faisons deux groupes de nous quatre :

emmenez frère Simon avec vous ;

à frère Denis est dévolu

d'entendre ma confession."

(Rutebeuf, "Poèmes de l'infortune", 1260, Le dit de Frère Denise le cordelier)>>.


- <<Les groupes sont déjà assemblés,

La reine et toutes les dames,

Les chevaliers et bien d'autres,

Dont une multitude de sergents

A droite, à gauche et partout.

(Chrétien de Troyes, "Le Chevalier de la charrette", 1170)>>.


- <<Le roi y va et toute sa cour,

En groupes nombreux on s'attroupe,

Personne ne demeure en arrière.

(Chrétien de Troyes, "Le Chevalier de la charrette", 1170)>>.


- <<Ici un garçon bouvier, trapu et d'une force herculéenne, se détacha du groupe où il se tenait inaperçu, éleva vers la lucarne une oie plumée, passée dans une forte broche de fer, ornée de bouquets de paille et de rubans. (George Sand, "La Mare au diable", 1846, Appendice II, Les livrées)>>.


- <<Cette confusion de cadavres occupait, du haut en bas, la montagne tout entière. Ceux qui survivaient ne bougeaient pas plus que les morts. Accroupis par groupes inégaux, ils se regardaient, effarés, et ne parlaient pas. (Gustave Flaubert, "Salammbô", 1862, Chapitre 12. L'aqueduc)>>.


- <<Le fils de famille se jette sur un sofa, et l'émotion l'empêche de parler. Sa mère, à la robe longue et traînante, s'empresse autour de lui, et l'entoure de ses bras. Ses frères, moins âgés que lui, se groupent autour du meuble, chargé d'un fardeau; ils ne connaissent pas la vie d'une manière suffisante, pour se faire une idée nette de la scène qui se passe. (Isidore Ducasse Lautréamont, "Les Chants de Maldoror", 1869, Chant VI)>>.


- <<Ce qu'ils font ? Eh mon Dieu ! ils s'en vont en pleine campagne, à deux ou trois lieues de la ville. Ils se réunissent par petits groupes de cinq ou six, s'allongent tranquillement à l'ombre d'un puits, d'un vieux mur, d'un olivier, tirent de leurs carniers un bon morceau de boeuf en daube, des oignons crus, un saucissot, quelques anchois, et commencent un déjeuner interminable, arrosé d'un de ces jolis vins du Rhône qui font rire et qui font chanter. (Alphonse Daudet, "Les Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon", 1872, Episode I, A Tarascon, Chapitre 2. Coup d'oeil général jeté sur la bonne ville de Tarascon. Les chasseurs de casquettes)>>.


(d) Voir A partir d'un mot. Axiomatisation. Collection.



(B) Quelques développements.



(a) Un groupe est l'ensemble informel ou la réunion formelle de plusieurs personnes. Le groupe se situe entre l'individu isolé et l'organisation réelle de taille importante (le village, l'entreprise). Le seul fait d'être membre d'un groupe provoque un relatif clivage des représentations chez chaque individu.


- <<Trois caractéristiques infléchissent de manière décisive la situation psychanalytique de groupe : la pluralité, le face à face, l'interdiscursivité. Le groupe rassemble plusieurs sujets, le plus souvent étrangers les uns aux autres au moment de la rencontre initiale. Chacun des membres du groupe se trouve ainsi confronté à une rencontre multiple et intense avec plusieurs autres. Ces autres sont des objets d'investissements pulsionnels, d'émois, d'affects et de représentations qui entrent en résonance ou en dissonance les uns avec les autres. Une telle situation produit une co-excitation interne et une excitation mutuelle importantes qui s'entretiennent dans un jeu complexe de projections et d'identifications réciproques. (René Kaës, "La consistance psychanalytique du travail psychanalytique en situation de groupe")>>.


(b) Par génération (filiation biologique), par inclusion (alliance, échange de femmes entre hommes) et par exclusion périodique (essaimage, majorité, émancipation, héritier universel, légitimaire), la famille est une évolution culturelle d'un groupe humain naturel.


(c) En Afrique, on trouve des traces de petits groupes de nomades, au Néolithique (9 000-7 500 before present), dans ce qui est devenu l'actuel désert du Sahara.


(d) Un groupe est une réunion, délibérée ou spontanée, d'objets ou de constructions. Un hameau est un groupe de maisons qui se constitue au fil des siècles. Dans la construction moderne, un groupe ou un pâté de maison se constitue par le lotissement d'un terrain, que le constructeur soit le même pour toutes ou choisi par chaque propriétaire de parcelle.


(e) Chez les parachutistes, un <groupe de saut> ou <stick>, désigne l'ensemble des parachutistes qui doivent sauter par la même porte, les uns derrière les autres, au cours du même passage de l'avion. Il faut faire si vite (vitesse de l'avion, tir de l'ennemi, atterrissage sur une <dropping zone> étroite, nécessité de se regrouper au sol pour se partager un équipement commun) que la progression dans l'avion ne se fait pas seulement "à la queue leu leu", mais "bitte-à-cul".


(f) Biologie. Un groupe sanguin est défini, par des caractéristiques antigéniques du sang, de telle manière que des personnes du même groupe sanguin puissent recevoir ou donner leur sang, au sein de la population affectée de ce groupe.


(g) Le psychanalyste anglais, d'origine hongroise, Michael Balint, a participé à l'élaboration de la dynamique des groupes. Il a aussi formé des médecins, à une certaine écoute de la parole du malade, dans le cadre des "groupes Balint".


(h) Sincérité, sollicitude et sympathie sont nécessaires au bon fonctionnement d'un groupe.


(i) Iconographie dans l'Art. Certains principes abstraits (Grâce, Inspiration, Mort) ne sont pas personnifiés par une personne individuelle, mais par un groupe : "Les Trois Grâces" (Raphaël, 1502-1503, Musée Condé, Chantilly), les Muses, les trois Parques.


- <<Il se fit un silence inouï ; l'on sentit

Que ce spectre était grand, car tout devint petit ;

L'aigle ouvrit son oeil fauve où l'âpre éclair palpite,

Et sembla retarder du côté de la fuite ;

L'Olympe fut noirci par l'ombre du géant ;

Jupiter se dressa, pâle, sur son séant ;

Le dur Vulcain cessa de battre son enclume

Qui sonna si souvent, dans sa forge qui fume,

Sur les fers des vaincus lorsqu'il les écrouait ;

Afin qu'on n'entendit pas même leur rouet

Les trois Grâces d'en haut firent signe aux trois Parques.

Alors le titan, grave, altier, portant les marques

Des tonnerres sur lui tant de fois essayés,

Ayant l'immense aspect des sommets foudroyés

Et la difformité sublime des décombres,

Regarda fixement les olympiens sombres

Stupéfaits sur leur cime au fond de l'éther bleu,

Et leur cria, terrible : O dieux, il est un Dieu !

(Victor Hugo, "La Légende des siècles", 1877, Partie 4, Le Titan)>>.


- <<Favoris des neuf Soeurs, achevez l'entreprise :

Donnez mainte leçon que j'ai sans doute omise ;

Sous ces inventions, il faut l'envelopper.

Mais vous n'avez que trop de quoi vous occuper :

Pendant le doux emploi de ma Muse innocente,

Louis dompte l'Europe ; et, d'une main puissante,

Il conduit à leur fin les plus nobles projets

Qu'ait jamais formés un Monarque.

Favoris des neuf Soeurs, ce sont là des sujets

Vainqueurs du temps et de la Parque.

(Jean de La Fontaine, "Fables", 1668, Livre 11, Epilogue)>>.


(j) Sémantique. Le sens du mot <groupe> doit aux mathématiques modernes le sème "structuration".


- <<La structure de groupe est une des structures algébriques les plus simples et, sans conteste, la plus importante des mathématiques modernes. Son universalité ne s'arrête pas là : le psychologue Piaget a mis en évidence le rôle essentiel joué par cette notion dans les mécanismes mêmes de la pensée, et H. Poincaré a pu dire que la notion de groupe préexiste dans notre esprit car la géométrie ne se concevrait pas sans elle. Cependant, il a fallu presque un siècle pour que se dégage sous forme abstraite cette notion qui est maintenant introduite couramment dans l'enseignement secondaire. (Encyclopaedia Universalis, Article "Algèbre")>>.


(k) Une forme extrême du groupe est le groupe fusionnel. C'est une composante du nazisme, comme forme du totalitarisme. Cette mystique du groupe de combat est issue de la guerre des tranchées et des corps francs de 1918.


- <<Hitler lui dit qu'il avait conçu sa mission à Pasewalk. Il venait de lui dire qu'il avait été gazé en 1921 ou 1922 et ajouta : «Comme j'étais allongé là, il m'apparut que je libérerais le peuple allemand et ferais de l'Allemagne un grand pays.» Ordonner à d'autres de commettre des atrocités en son nom devint pour Adolf Hitler un succédané des violences qu'il était incapable de commettre lui-même. Son histoire personnelle n'aurait aucun intérêt si Hitler avait eu une vie normale, mais son combat personnel imprima sa marque sur le parti politique qu'il créa et l'État nazi qui en résulta. «À la base de l'idéologie nationale-socialiste, dit Fest, on ne trouve qu'un concept tangible : le combat. Ce concept a déterminé les classifications, les valeurs et la terminologie du mouvement des débuts et du III° Reich. Il n'a pas seulement donné à la profession de foi de Hitler "Mein Kampf" un titre significatif, il a également si profondément marqué le contenu et le ton du livre qu'il lui arrive même d'éclipser l'autre pierre angulaire de l'idéologie nationale-socialiste, le concept de race.» Le combat de Hitler pour son identité et sa prédominance trouva une résonance dans les millions d'Allemands, les anciens soldats en particulier, qui étaient ressortis appauvris, humiliés et déclassés par la Grande Guerre, ainsi que l'explique le sociologue Eric Wolf : <La Première Guerre mondiale vit l'apparition de nouvelles méthodes de combat [ ...] : la guerre de masse qui dévorait, dans le labyrinthe des tranchées, les vies humaines par centaines de milliers. Ce fut pour beaucoup une expérience liminale [c'est-à-dire qu'un seuil a été franchi] [...] qui les sépara de la vie ordinaire, fit voler en éclats la structure de leur ego et les poussa à réintégrer le groupe primaire de leurs compagnons de combat. Cette suite d'effondrement et de réémergence donna naissance au syndrome de l'ancien combattant qui se retrouvait incapable de communiquer avec son ancien entourage. Après la défaite de l'Allemagne, beaucoup d'entre eux continuèrent à se battre, particulièrement contre les Gardes rouges de la révolution, dans les pays de la Baltique. Environ 200 000 anciens combattants rejoignirent les bandes armées des corps francs de l'après-guerre et devinrent les mercenaires de la droite pendant la république de Weimar, jusqu'à ce qu'ils soient absorbés par le mouvement [nazi]. «Ces gens nous ont dit que la guerre était terminée, dit le futur chef des SA, Friedrich Wilhelm Heinz. C'était une blague : nous étions nous-mêmes la guerre.»> (Richard Rhodes, "Extermination : la machine nazie. Einsatzgruppen, à l'Est, 1941-1943", 2002, traduction Marie-Claude Rideau, Autrement, Paris, 2004, page 44)>>.


(l) Cette idéologie du groupe n'est pas morte. Le conformisme social, contraire à l'esprit d'entreprise, en témoigne, même dans les ... entreprises. Seules les organisations virtuelles peuvent lui donner un démenti. Sur Internet, les succès de Linux et de Wikipédia sont des exemples récents. Dans ce réseau, chacun peut être à la fois producteur et consommateur. C'est pourquoi certains parlent d'un <web 02>.


- <<Seul, et convaincu de sa solitude, l'individu se révèle incapable de croire réellement en la nécessité d'atteindre un objectif quelconque. C'est pourquoi le déclin des croyances collectives mène inexorablement à la chute de l'individu. Dans une telle ambiance peuvent émerger des dirigeants égarés, grégaires, mimétiques, assoiffés de reconnaissance plutôt que de réel pouvoir : simultanément incapables d'agir collectivement et d'exprimer des opinions individuelles. La théorie philosophique ou sociologique ne permettait pas de prévoir une telle fragilité. Nous aurions pu attendre de la montée du niveau culturel, de l'émergence d'une classe cultivée, savante, celle d'un homme nouveau, capable de dominer l'histoire. Certains effets positifs sont apparents, dont l'attachement à la liberté qui rend l'hypothèse d'un totalitarisme à l'ancienne inconcevable. Mais pour l'essentiel, la réalité que nous observons est une réversion intellectuelle, le spectacle fantastique de classes supérieures européennes aussi égarées que celles des années 30, dont le déflationnisme avait tant fait pour encourager la montée des fascismes. Nous vivons une extraordinaire leçon : l'histoire nous dit que l'homme, lorsqu'il ne se pense plus comme membre d'un groupe, cesse d'être un individu. (Emmanuel Todd, "L'Illusion économique. Essai sur la stagnation des sociétés développées", Gallimard, 1998, page 314)>>.


(m) Système de mise en valeur de la nature. Dans des conditions difficiles (climat, altitude), les communautés familiales sont un exemple d'exploitation du sol par le groupe. Dans certaines régions, ceci est prévu par la coûtume régionale.


- <<L'ancienne coutume du Bourbonnais publiée le 19 septembre 1500, nous dit que la communauté coutumière s'acquérait par "demourance" d'un an et un jour, soit 14 ans pour les "masles" et 12 ans pour les filles à la condition qu'ils soient "injuris", hors de la puissance paternelle et que mixion de leurs biens ait été faite ; la nouvelle coutume ; dans son article 267, reprenait en partie les termes de l'ancienne en précisant qu'il n'y avait convention expresse de société "fors et excepté entre deux frères", auquel cas, il était requis qu'ils soient agés de 20 ans pour le moins. L'article 270 précisait qu'en cas de décés de l'un des conjoints par mariage ou autres communs personniers laissant des enfants mineurs, les survivants ou communs avaient un délai de 40 jours pour procéder à un inventaire ou partage, faute de quoi la communauté continuait. Il en a été ainsi au décés en 1764 de Nicolas Pinet (Cité par Prajoux, "Chronique Roannaise", Souchier 1928), de la communauté des Gauchers au Village de Saint-Jacques-des-Biefs, paroisse de St-Bonnet des Quarts (Loire), ou en présence d'enfants mineurs, il y avait eu apposition des scellés et inventaire des biens, lesquels avaient nécessité un travail de 11 jours. Cette expression "entre deux frères" était selon Jacques Potier ("Commentaire imprimé de la Coutume") exorbitante de droit commun et de la maxime générale de France ; elle ne s'étendait pas à la soeur ni à la femme du frère. Pour Mathieu Auroux des Pommiers ("Droit Public, Droit canonique") le mot de "frère" devait être interprété selon sa propre signification sans l'étendre. L'apanage en faveur des "masles" avait pour but la conservation des familles et la transmission à ces derniers de la fortune immobilière ; l'expression en question à partir du 17 éme siècle se trouvera dans la plupart des actes aussi bien entre mari et femme qu'avec les parents de ces derniers ; déformée par la pratique et dans ses applications elle deviendra une clause de style consacrée par l'usage. Nous avons eu dans cette région une forme d'exploitation du sol par le groupe ; jusqu'au 17 ème siècle et encore au 18 ème il n'y avait guère de place pour l'exploitation individuelle. Une seule communauté familiale à l'origine de nos hameaux, puis l'éclatement de celle-ci dès que l'importance numérique du groupe n'était plus en rapport avec les possibilités de rendement de la propriété exploitée. C'est pourquoi nous trouvons plusieurs communautés côte à côte dans le même hameau ; elles essaimaient à proximité par une sorte de lien mystique, qui les attachait encore au groupe originaire et, aussi, parce que l'aménagement et la connaissance du sol leur conféraient, dans l'endroit qu'elles quittaient, des avantages qu'il n'était pas nécessaire d'aller chercher ailleurs ; hommes de labeur, ils connaissaient la terre et le profit qu'ils pouvaient en retirer. Cette coexistence au sein du même hameau entrainait pour les exploitants une dénomination parfois différente ; on ajoutait au patronyme le nom du lieu pour le désigner plus clairement. Il se pouvait aussi que l'exploitant changeant de propriété conservait son nom qui devenait alors nom le lieu d'origine et recevait en plus, en sa qualité de nouveau venu, le nom de la terre qu'il allait cultiver et puis, souvent, un gendre venait s'adjoindre à la communauté familiale, on le désignait alors du nom de son beau-père ou du groupe social dont il devenait membre. La majorité des noms de famille a eu sa source dans les rapports de l'homme et de la terre. L'homme vivait dans les dépendances de la nature laquelle affirmait à cette époque, comme nous l'avons dit plus haut, la primauté du groupe sur l'individu. Noms de terre et noms de personnes dans beaucoup de cas ne faisaient qu'un. Tel est celui du hameau des "Pions" que l'on a considéré comme un clan. Au cours de nos recherches nous avons noté une disparition à peu près totale du patronyme dans la commune de Lavoine et dans les communes voisines du Mayet ainsi que dans celui de Saint-Just-en-Chevalet, dont dépend Saint-Priest-la-Prugne. Le dictionnaire topographique du Forez de JE Dufour mentionne en tout et pour tout deux maisons isolées sans rapport avec notre toponyme. (Claude Alamartine, "Saisies-exécutions au village Pion, 1964, repris in "En Montagne Bourbonnaise... Les Pions", Editions des Amis de la Montagne Bourbonnaise, n° spécial, Hiver 2001, pages 70-71)>>.


(n) Intégration négative. Politiquement, le groupe se définit contre d'autres groupes :


- <<Entre les deux guerres, l'Union catholique s'autodéfinit, de façon très intéressante et significative, comme un parti d'ordres (Standen en néerlandais). Elle veut surmonter l'affrontement des classes par une association, dont la formulation idéologique renvoie directement et explicitement au vocabulaire de l'Ancien Régime [Pour une description plus complète des «ordres» catholiques, voir E. Witte et J. Craeybeckx, La Belgique politique de 1830 à nos jours, p. 202-203]. Quatre ordres constituent la subsociété catholique, qui représente en Flandre l'essentiel de la structure sociale :

- la Fédération des associations et cercles catholiques réunit les notables bourgeois ;

- le Boerenbond organise la paysannerie ;

- l'Allgemeen Christelijk Werkersverbond rassemble le prolétariat ;

- la Fédération chrétienne des classes moyennes définit un quatrième ordre, nettement moins puissant.

L'organisation officielle de la démocratie-chrétienne belge rend transparent le lien entre famille souche et société d'ordres. Le régionalisme ethnocentrique. Les idéaux autoritaires et inégalitaires de la famille souche nourrissent en général une tendance à l'intégration négative : l'individu veut appartenir à un groupe puissamment structuré, mais qui se définit contre d'autres groupes. Le trait autoritaire du système familial implique l'anti-individualisme, l'absorption de l'individu par le groupe. Le trait inégalitaire favorise le sentiment de la différence entre les hommes, entre les groupes. Le concept d'intégration négative, utilisé par Günther Roth pour décrire la situation de la classe ouvrière et de la social-démocratie dans l'Allemagne impériale, me semble applicable à bien des situations idéologiques ou religieuses créées par un système anthropologique de type souche [Dans "The Social-Democrats in Imperial Germany". Cf. supra p. 257-258]. L'intégration négative peut caractériser une communauté religieuse (majoritaire ou minoritaire), une catégorie socio-économique (la classe ouvrière par exemple), un groupe ethnique (ainsi le Volk au sens allemand, par rapport au reste de l'humanité). Ces trois types d'intégration négative correspondent aux trois « possibles » idéologiques de l'époque moderne : idéologie socialiste, idéologie nationaliste de droite, idéologie religieuse réactionnelle. En Belgique, les idéologies socialiste (social-démocratie) et religieuse réactionnelle (démocratie-chrétienne) occupent l'essentiel du terrain. Le catholicisme est trop puissant, entre 1900 et 1965, pour que se manifeste pleinement le potentiel autoritaire et inégalitaire dans le domaine du nationalisme. L'intégration négative par l'ethnie est étouffée par l'Église ou par la classe. (Emmanuel Todd, "L'Invention de l'Europe", Seuil, 1990, page 306)>>.


(o) Pensée de groupe. En 1972, Irving Janis invente et définit le terme GroupThink.


(p) Voir Axiomatisation. Corpus. Parsonnier. Les Pions.


(q) Lire "Entreprise Ecoute". "Organisations Virtuelles".



(C) Astronomie.



(a) Un groupe de comètes est un ensemble de comètes dont les orbites sont proches et qui résultent de l'éclatement d'une ancienne comète unique.


(b) La comète vue par Aristote est devenue le groupe de Kreutz.


- <<On connaît cette comète (et ses multiples résidus ultérieurs) depuis l'époque d'Aristote qui l'observa lui-même en –371 alors qu'il n'était qu'un enfant de 12 ans. Elle fut observée très près du Soleil à l'horizon ouest et, paraît-il, sa queue s'étendit sur un tiers du ciel. Il est certain qu'il s'agissait alors d'un astre très impressionnant, d'une très grosse comète unique qui se divisa à l'occasion de ce passage dans la banlieue solaire en deux fragments, observation capitale rapportée par l'historien grec Ephorus (IVe siècle avant J.-C.). C'était le premier acte d'une fragmentation due principalement aux forces de marée solaire, prélude à un véritable émiettement ultérieur. Dès 1880, Daniel Kirkwood (1814-1895), l'un des spécialistes de mécanique céleste de l'époque, suggéra que la Grande comète de Mars 1843 (1843 I) et la Grande comète australe de 1880 (1880 I) pouvaient être associées avec la comète de –371, du fait de la similarité du mouvement. On sait que la comète 1843 I passa à seulement 0,0055 UA (soit 820 000 km) du Soleil, sur une orbite inclinée à 144,4°, donc rétrograde, et la comète 1880 I à 0,0055 UA également, avec i = 144,7°. La parenté de ces deux comètes ne faisait aucun doute. Les considérer comme des "descendantes" de la comète d'Aristote était plus hardi, mais cette hypothèse de Kirkwood a été largement confirmée par tous les travaux ultérieurs sur le sujet. En 1882, deux nouvelles comètes, la comète Tewfik (1882 I) et la Grande comète de Septembre (1882 II), qui atteignit l'incroyable magnitude de –15, passèrent elles aussi très près du Soleil avec des inclinaisons similaires (i = 142-144°). Cinq ans plus tard, une troisième comète, la Grande comète australe de 1887 (1887 I) les suivit avec un parcours analogue. C'était donc un véritable chapelet de comètes qui revenaient au périhélie, à proximité immédiate du Soleil, vestiges de la comète mère d'Aristote. On doit à l'astronome allemand Heinrich Kreutz (1854-1907) d'avoir montré que les quatre comètes des années 1880 avaient des orbites similaires et qu'elles descendaient directement de la comète de 1106, elle-même fragment de la comète d'Aristote à son 4e passage près du Soleil. Cette comète de 1106 avait P = 370 ans environ et a = 51,5 UA environ, donc un demi-grand axe à l'intérieur de la ceinture de Kuiper (bien qu'elle n'en

soit pas originaire). C'est lui qui donna son nom à ce groupe de comètes, véritables Sun-grazers : le groupe de Kreutz. Il convient de noter que ce groupe est en fait une véritable famille, puisque tous ses membres ont un progéniteur commun. Kreutz identifia également les comètes de 1668 et de 1695 comme faisant partie de ce groupe. A la fin du XIXe siècle, on connaissait donc neuf membres du groupe de Kreutz, fragments de la comète d'Aristote. Au cours du XXe siècle, de nombreux nouveaux membres du groupe ont été identifiés (25), comètes du Toit (1945 VII), Pereyra (1963 V), la fameuse comète Ikeya-Seki (1965 VIII) qui atteignit la magnitude –10 et White-Ortiz-Bolelli (1970 VI), toutes sur des orbites similaires facilement identifiables. De plus, entre 1979 et 1984, six comètes non observées de la Terre furent enregistrées par le satellite Solwind, faisant partie de la même famille. Toutes heurtèrent le Soleil qui récupère souvent une petite partie du monde dont il a la charge. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Entre 1987 et 1989, dix nouveaux fragments, qui heurtèrent eux aussi pour la plupart le Soleil, furent repérés par le satellite SMM. Ces comètes non observées reçurent les désignations Solwind 1 à 6 et SMM 1 à 10. Ensuite, entre 1996 et 1998, une trentaine de nouveaux fragments du même groupe ont été repérés très près du Soleil par le satellite SOHO, destiné principalement à l’étude de notre étoile, mais capable aussi, accessoirement, d’annoncer des impacts minuscules à sa surface. Depuis, ce sont des centaines de fragments qui ont été repérés par SOHO qui s'est avéré un surveillant du ciel

extraordinairement efficace. Il semble bien que ce soient des milliers de fragments minuscules qui ont été successivement engendrés par les résidus principaux de la comète mère, qui devait être un astre d’envergure, d’un diamètre centaurien (plusieurs centaines de km). La généalogie complète de cette grande famille de comètes a été recherchée par Brian Marsden, le spécialiste bien connu du calcul des orbites et auteur du catalogue général des comètes. Il a montré que les comètes du groupe de Kreutz se rangent aujourd'hui en deux sous-groupes principaux. Il apparaît clairement que le progéniteur de tous ces résidus cométaires est bien la comète de –371, et que la majorité des fragments connus sont directement issus de la comète de 1106. Celle-ci s'est fragmentée depuis en plusieurs morceaux de tailles inégales, certains de ceux-ci s'étant eux-mêmes fragmentés à leur tour. Marsden a montré que les comètes de 1843, 1880, 1882 I et 1887 qui se sont succédé en moins d'un demi-siècle sont des fragments de la comète fantôme (non observée mais bien réelle) de 1487, qui s'est scindée en au moins quatre gros blocs, notamment la Grande comète de Septembre 1882 qui a atteint la magnitude –15 et qui était encore elle-même une comète d'un diamètre appréciable. La comète 1882 II s'est scindée en quatre fragments, celle de 1965 (Ikeya-Seki) en trois fragments. On assiste donc à un véritable émiettement progressif. Certains fragments reviendront encore près du Soleil, d'autres l'ont déjà heurté et n'existent plus, d'autres encore se sont littéralement désintégrés et sont redevenus poussière cosmique. L'exemple du groupe de Kreutz est extrêmement instructif et montre clairement la réalité et l'importance de ce problème de fragmentation et d'émiettement et celui des comètes apparentées, c'est-à-dire issues d'un progéniteur unique, parfois d'un gros diamètre comme c'était obligatoirement le cas pour la comète d'Aristote. D'où venait-elle : nuage de Oort ou ceinture de Kuiper ? Probablement du nuage de Oort, compte tenu de l'inclinaison rétrograde de 145° (180 - 145 = 35°). Elle semble, dès le début, avoir dû subir une fragmentation du fait d'une cohésion physique insuffisante des glaces et des poussières la composant. La comète d'Aristote et ses innombrables débris sont uniquement composés de matière fragile et elle s'est quasiment désintégrée en moins de 2500 ans et quelques passages à proximité du Soleil. Il est quasiment certain que d'ici quelques millénaires, il ne restera rien de la fameuse comète d'Aristote. Tout redevient poussière, parfois à une vitesse accélérée pour les comètes, surtout si elles viennent frôler le Soleil. (Michel-Alain Combes, Astronome, "La terre bombardée", 2006, document du web, Partie II, Les Causes, Chapitre 7, Les comètes)>>.


(c) De manière identique, on parle d'une famille d'astéroïdes.


(d) Voir Centaure.


Nota Bene. Les mots en gras sont tous définis sur le cédérom encyclopédique.