Procès de mise en valeur


(a) Le procès de mise en valeur est le processus au cours duquel émerge la valeur.


(b) Deux situations très différentes prévalent selon que la valeur est celle des humains et de la nature ou celle des marchandises.


(c) Pour l'Economie Politique, le procès de mise en valeur est celui par lequel une marchandise va acquérir une valeur d'échange (une quantité plus ou moins importante) lors de sa vente sur le marché. Il s'agit d'une vision économique du développement.


(d) Pour Robinson Crusoé, le procès de mise en valeur est celui par lequel, malgré sa solitude extrême et l'improbabilité de sa reproduction biologique, il réalise son humanité et transforme l'Ile du Désespoir en son Royaume. Il s'agit donc d'une mise en valeur mutuelle de l'homme et de la nature. On peut parler de mise en valeur de la nature par la nature, puisqu'il y a mise en valeur mutuelle de la nature interne de l'homme et de la nature externe (environnement de celui-ci). Il s'agit, ici, d'une vision cognitive du développement.


(e) Références d'usage du terme par Marx et ses épigones :


- <<Cette différence entre capital fixe et circulant, par rapport au calcul du coût de production, ne fait que confirmer ceci : le coût de production semble résulter de la valeur-capital dépensée ou du prix que coûtent au capitaliste lui-même les éléments de production qu'il dépense, travail compris. D'autre part, la fraction de capital variable investie en force de travail et qui, par rapport à la création de valeur, figure ici sous la rubrique de capital circulant est expressément identifiée au capital constant (fraction de capital existant en matières de production). Ainsi est accomplie la mystification du procès de mise en valeur du capital. [Dans le livre I, chap. VII, 3**, nous avons montré par l'exemple de N.W. Senior quelle confusion ceci peut faire naître dans la tête des économistes.] Jusqu'ici nous n'avons considéré qu'un seul élément de la valeur de la marchandise : le coût de production. Il nous faut maintenant tourner nos regards vers son autre composante : la fraction excédant le coût de production ou plus-value. D'abord la plus-value est donc une part de la valeur de la marchandise excédant le coût de production. Mais, le coût de production étant égal à la valeur du capital dépensé qui d'ailleurs prend sans cesse de nouveau la forme des éléments matériels de ce capital, cet excédent de valeur est une addition à la valeur du capital qui a été dépensé pour la production de la marchandise et qui au terme de la circulation de celle-ci revient à son point de départ. (Karl Marx, "Le Capital", Livre III, Section I, La transformation de la plus-value en profit et du taux de plus-value en taux de profit, Chapitre I, Coût de production et profit)>>.


- <<Cette conception fut surtout à la mode dans la seconde moitié du XVII° siècle (on la rencontre chez Petty, par exemple) et elle est encore développée aujourd'hui avec le plus grand sérieux par les économistes vulgaires et particulièrement par les statisticiens allemands ["L'ouvrier dispose d'un capital si l'on considère comme un intérêt la valeur en argent de son salaire annuel... Si l'on capitalise à 4 % le salaire moyen, on trouvera que la valeur moyenne d'un ouvrier agricole est de 1.500 thalers dans l'Autriche allemande, de 1.500 en Prusse, de 3.750 en Angleterre, de 2.000 en France et de 750 dans la Russie centrale." Von Reden, Vergleichende Kulturstatistik, Berlin, 1848, p. 134.]. Malheureusement, deux faits viennent en établir l'inanité : d'abord, l'ouvrier doit travailler pour obtenir cet intérêt ; ensuite, il ne peut pas transformer en argent, en le transférant à autrui, le capital constitué par sa force de travail. Bien plus, la valeur annuelle de sa force de travail est égale à son salaire moyen annuel, et il doit fournir à celui qui la lui achète, non seulement cette valeur, mais la plus-value. Dans le système esclavagiste, le travailleur est un capital, dont la valeur est égale au prix auquel il est acheté ; celui qui prend un esclave en location doit payer, non seulement l'intérêt du prix d'achat, mais l'usure annuelle du capital. Constituer un capital fictif s'appelle capitaliser. On capitalise tout revenu qui se répète d'une manière régulière, en calculant quel serait le capital qui, placé au taux moyen d'intérêt, donnerait ce revenu. Soit, par exemple, un revenu annuel de 100 £. Si le taux de l'intérêt est de 5 %, 100 £ seront l'intérêt annuel de 2.000 £ et ces 2.000 £ seront la valeur capitalisée du titre de propriété qui donne droit à un revenu annuel de 100 £. Celui qui achètera le titre de propriété sera donc autorisé à considérer les 100 £ comme l'intérêt à 5 % du capital qu'il aura avancé pour son achat. Toute trace du procès de mise en valeur du capital disparaît dans ce raisonnement et la conception du capital-automate, engendrant de la valeur par lui-même, y atteint son plus haut degré de pureté. Même lorsque le titre fiduciaire ne représente pas un capital purement illusoire comme lorsqu'il s'agit de la dette publique, la valeur comme capital de ce titre est illusoire. Nous avons vu comment le crédit provoque l'association des capitaux. Les papiers-valeurs sont les titres de propriété de ces capitaux fusionnés. Les actions de chemins de fer, de charbonnages, de sociétés de navigation représentent un capital réel, soit le capital engagé et fonctionnant dans ces entreprises, soit l'argent avancé par les participants pour y être dépensé comme capital (ce qui n'empêche évidemment pas qu'elles puissent également reposer sur la fraude). Mais ce capital n'existe pas deux fois, une fois comme capital dont la valeur réside dans les titres de propriété, dans les actions, et une fois comme capital engagé ou à engager réellement dans ces entreprises. Il existe sous cette dernière forme seulement, et l'action est simplement un titre de propriété donnant droit à une part proportionnelle de la plus-value qui sera réalisée dans l'entreprise. Peu importe que A vende son action à B et que celui-ci la cède à C; ces transactions n'auront d'autre conséquence que de permettre à A et B de transformer en capital leur titre de propriété et à C de convertir son capital en un titre de propriété lui donnant droit à une plus-value éventuelle à obtenir du capital des actions. (Karl Marx, "Le Capital", Livre III, Section V, Subdivision du profit en intérêt et profit d'entreprise. Le capital productif d'intérêts, Chapître XXIX : Les éléments constitutifs du capital de banque)>>.


- <<On voit donc que les rapports de production entre les hommes se développent sur la base d'un certain état des forces productives. Les catégories économiques présupposent certaines conditions techniques. Mais, en économie politique, les conditions techniques n'apparaissent pas comme conditions du procès de production considéré sous ses aspects techniques, mais seulement comme présuppositions des formes socio-économiques déterminées que revêt le procès de production. Le procès de production apparaît sous une forme socio-économique donnée, en l'occurrence sous la forme de l'économie marchande-capitaliste. L'économie politique traite précisément de cette forme d'économie et de l'ensemble des rapports de production qui lui sont propres. La célèbre affirmation de Marx, selon laquelle la valeur d'usage est le présupposé de la valeur d'échange et non sa source, doit être formulée de façon plus générale : l'économie politique traite des «formes économiques», des types de rapports de production entre les hommes dans la société capitaliste. Cette société suppose certaines conditions qui ont trait au procès matériel de production et aux facteurs techniques qui en sont les éléments. Mais Marx s'est toujours opposé à ce que l'on transforme les conditions matérielles du procès de production, présupposés de l'économie politique, en objet d'étude de cette science. Il a toujours repoussé les théories qui font de la valeur d'usage la source de la valeur, des propriétés techniques de l'or la source de la monnaie et de la productivité technique des moyens de production la source du capital. Les catégories économiques (ou les formes sociales des objets) sont évidemment très étroitement liées au procès matériel de production, mais on ne peut les déduire directement de ce procès ; il faut passer par un intermédiaire, les rapports de production entre les hommes. Même dans les catégories où les aspects technique et économique sont si étroitement liés qu'ils se recouvrent presque, Marx fait toujours très habilement la distinction en considérant le premier comme le présupposé du second. Par exemple, le développement technique des éléments personnel et matériel de la production est un présupposé, ou une base, sur lequel se développe la distinction «fonctionnelle», «formelle» ou socioéconomique entre capital constant et capital variable. Mais Marx refuse obstinément de fonder la distinction entre eux sur le fait qu'ils ont «payé un élément de production matériellement différent» (Le Capital, L. III, t. 6, p. 52). Cette distinction repose pour lui sur le rôle différent qu'ils jouent, de par leur fonction, «dans le procès de mise en valeur du capital» (ibid.), La différence entre capital fixe et capital circulant se trouve dans les différents modes de transfert de leur valeur au produit, et non dans la rapidité de leur usure physique. Cette dernière distinction donne une base matérielle, un présupposé, un «point de départ» à la première, mais ce n'est pas elle qui nous intéresse, car elle a un contenu technique et non un contenu économique (Le Capital, L. Il, t. 4, p. 182 et 183 ; Theorien, t. 3, p. 478). Accepter ce présupposé technique comme objet de notre étude serait ravaler notre analyse au rang de celle des économistes vulgaires que Marx critiquait pour la «grossièreté» de leur méthode analytique, qui leur faisait considérer les «différences de forme» «seulement par leur côté matériel» (Le Capital, L. III, t. 6, p. 332). La théorie économique de Marx traite précisément des «différences de forme» (formes socio-économiques, rapports de production) qui se développent effectivement sur la base de certaines conditions matérielles-techniques, mais qui ne doivent pas être confondues avec celles-ci. Là est précisément la nouveauté de la formulation méthodologique des problèmes économiques qui constitue le grand mérite de Marx et qui distingue son œuvre de celle de ses prédécesseurs, les économistes classiques. L'attention de ceux-ci se portait sur la découverte de la base matérielle-technique des formes sociales ; ils prenaient ces formes comme une donnée, et non comme l'objet d'une analyse à poursuivre. Découvrir les lois de l'origine et du développement des formes sociales que revêt le procès de production matériel-technique à un niveau donné de développement des forces productives, tel est l'objectif de Marx. (Isaac Roubine, "Essais sur la théorie de la valeur de Marx", 1928)>>.


- <<On sait maintenant que les forces productives, dans une branche donnée, s'expriment par le rapport de leurs éléments ou par la grandeur proportionnelle du travail mort et du travail vivant (c/v) et que le rapport de production fondamental s'exprime par le rapport des nouvelles valeurs tirées du travail vivant (pl/v). La somme de ces éléments, travail matérialisé, travail vivant et valeurs nouvellement créées, constitue les éléments du procès de production et de reproduction du capital. Le maintien du rapport de production du MPC, c'est-à-dire l'extorsion de plus-value, est régi par l'augmentation de son taux, soit de pl/v. En effet, la masse absolue de surtravail étant obtenue en rapport avec une masse donnée de travail nécessaire, c'est la diminution de celle-ci, une fois atteintes les limites de la journée de travail, qui permettra l'augmentation de l'autre. L'augmentation absolue de surtravail dépend donc rigoureusement de son rapport au travail nécessaire (v). Pour accroître la productivité du travail vivant, ou pour diminuer le temps de travail nécessaire pour une même journée donnée, il faut réduire le temps de production ou la valeur des biens nécessaires à la reproduction de la force de travail. Cette réduction ne peut s'atteindre que par une augmentation absolue et relative de la productivité du travail vivant. Comme Marx le dit à plusieurs reprises, l'indice de l'accroissement de la productivité du travail vivant se retrouve dans une modification des grandeurs de valeur réciproques du capital constant (c) et du capital variable (v), soit dans une modification de c/v, de la composition organique du capital. En effet, le travail vivant, une fois atteint un rendement absolu, ne peut produire davantage sans l'aide du capital fixe, c'est-à-dire sans un perfectionnement matériel des conditions de son travail. Cet accroissement matériel – déplacement de l'équilibre entre c et v – ou modification du rapport des FP – est commandé par le RP. On voit donc bien que pl/v et c/v sont réellement imbriqués. Voici comment Marx exprime ce rapport : «à mesure que se produit la baisse relative du capital variable, donc que se développe la force productive sociale du travail, il faut une masse de plus en plus grande de capital total pour mettre en œuvre la même quantité de force de travail et absorber la même masse de surtravail». L'augmentation du taux d'exploitation de la force de travail présuppose et engendre, donc, une masse de plus en plus grande de capital fixe pour la même quantité de capital variable, soit une composition organique du capital (c/v) croissante. L'augmentation de pl/v doit donc correspondre à l'augmentation de c/v. C'est pourquoi, au niveau abstrait, pl/v et c/v devraient être directement proportionnels. Or, dans sa réalisation, le procès de mise en valeur du capital à cause des contradictions qui l'animent, ne se déroule pas ainsi, et c'est ce qu'il faut voir. Pour l'instant, retenons que l'unité du procès de production capitaliste soit c + v + pl dans lequel la force de travail (v) «agit en tant que créatrice de valeur», est composée de deux rapports ayant une interdépendance absolue, c'est-à-dire v et c d'une part (c/v) et (v) et (pl) (pl/v) d'autre part. Si (v) est constant, (c) et (pl), capital fixe et nouveau capital, se multiplient donc réciproquement sous la pulsion constante de l'augmentation de pl. L'augmentation du nouveau capital (pl) et du capital mort (c) sont donc les deux aspects organiques de l'exploitation du travail vivant, i.e. de la diminution de sa valeur relative. L'un et l'autre aspect augmentent donc en fonction de la diminution du dernier. C'est pourquoi, dans le procès de travail, l'élément constant des forces productives (c) est-il le facteur organique de la mise en œuvre du RP, dans le procès de production (pl). C'est aussi pourquoi sa grandeur proportionnelle représente un aspect contradictoire du rapport Capital-Travail. Nous allons voir en quoi la grandeur proportionnelle du travail mort, condition de l'extorsion de la plus-value, est une forme de la contradiction fondamentale. (Anne Legaré, "Théorie et méthode pour l'analyse de la relation capital monopoliste / capital non monopoliste", 1978, in Pierre Fournier, "Le capitalisme au Québec")>>.


(f) Voir Monter en épingle. Moyens de production. Valeur de la force de travail. Valeur-marchandise.


(g) Lire "Mise Mutuelle". "Plus-Value Profit". "Robinson Crusoé". "Trois Niveaux".







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Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Lundi 23 Juin 2008



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