Cardinal de Retz



(A) Jean-François Paul de Gondi, cardinal de Retz (1613-1679).



(a) Jean-François Paul de Gondi est le fils de Philippe-Emmanuel de Gondi, comte de Joigny. Il est le petit-neveu du cardinal de Gondi.


(b) Jean-François Paul de Gondi est aussi le neveu et le coadjuteur de Henri de Gondi, archevêque de Paris. Il n'a aucune vocation à la vie religieuse. Par deux fois il provoque un duel dans l'unique espoir de se voir condamné et privé de sa soutane. Son père semblait vouloir occuper les titres disponibles pour la famille :


- <<Je ne crois pas qu'il y eût au monde un meilleur cœur que celui de mon père, et je puis dire que sa trempe était celle de la vertu. Cependant et ces duels et ces galanteries ne l'empêchèrent pas de faire tous ses efforts pour attacher à l'Eglise l'âme peut-être la moins ecclésiastique qui fût dans l'univers : la prédilection pour son aîné et la vue de l'archevêché de Paris, qui était dans sa maison, produisirent cet effet. Il ne le crut pas, et ne le sentit pas lui-même ; je jurerais même qu'il eût lui-même juré, dans le plus intérieur de son cœur, qu'il n'avait en cela d'autre mouvement que celui qui lui était inspiré par l'appréhension des périls auxquels la profession contraire exposerait mon âme : tant il est vrai qu'il n'y a rien qui soit si sujet à l'illusion que la piété. Toutes sortes d'erreurs se glissent et se cachent sous son voile ; elle consacre toutes sortes d'imaginations ; et la meilleure intention ne suffit pas pour y faire éviter les travers. Enfin, après tout ce que je viens de vous raconter, je demeurai homme d'Eglise ; mais ce n'eût pas été assurément pour longtemps, sans un incident dont je vais vous rendre compte. (Cardinal de Retz, "Mémoires">>.


(c) Jean-François Paul de Gondi, est un galant, un factieux, un frondeur (1648) contre Mazarin, un pamphlétaire ("Manifeste du duc de Beaufort", "Remontrance au roi"), un libertin (plusieurs maîtresses), un homme d'Église, coadjuteur de l'évêque de Paris, un "papabile" qui participe à trois conclaves (1655, 1667, 1669), un ami de saint Vincent de Paul et un grand écrivain.


- <<Enfin ma conduite me réussit, et au point qu'en vérité je fus fort à la mode parmi les gens de ma profession, et que les dévots mêmes disaient, après M. Vincent, qui m'avait appliqué ce mot de l'Evangile : que je n'avais pas assez de piété, mais que je n'étais pas trop éloigné du royaume de Dieu. (Cardinal de Retz, "Mémoires").


- <<Paul de Gondi, cardinal de Retz, a beaucoup d'élévation, d'étendue d'esprit, et plus d'ostentation que de vraie grandeur de courage. Il a une mémoire extraordinaire, plus de force que de politesse dans ses paroles, l'humeur facile, de la docilité et de la faiblesse à souffrir les plaintes et les reproches de ses amis, peu de piété, quelques apparences de religion. Il paraît ambitieux sans l'être ; la vanité, et ceux qui l'ont conduit, lui ont fait entreprendre de grandes choses presque toutes opposées à sa profession ; il a suscité les plus grands désordres de l'Etat sans avoir un dessein formé de s'en prévaloir, et bien loin de se déclarer ennemi du cardinal Mazarin pour occuper sa place, il n'a pensé qu'à lui paraître redoutable, et à se flatter de la fausse vanité de lui être opposé. Il a su profiter néanmoins avec habileté des malheurs publics pour se faire cardinal ; il a souffert la prison avec fermeté, et n'a dû sa liberté qu'à sa hardiesse. La paresse l'a soutenu avec gloire, durant plusieurs années, dans l'obscurité d'une vie errante et cachée. Il a conservé l'archevêché de Paris contre la puissance du cardinal Mazarin ; mais après la mort de ce ministre il s'en est démis sans connaître ce qu'il faisait, et sans prendre cette conjoncture pour ménager les intérêts de ses amis et les siens propres. Il est entré dans divers conclaves, et sa conduite a toujours augmenté sa réputation. Sa pente naturelle est l'oisiveté ; il travaille néanmoins avec activité dans les affaires qui le pressent, et il se repose avec nonchalance quand elles sont finies. Il a une présence d'esprit, et il sait tellement tourner à son avantage les occasions que la fortune lui offre qu'il semble qu'il les ait prévues et désirées. Il aime à raconter ; il veut éblouir indifféremment tous ceux qui l'écoutent par des aventures extraordinaires, et souvent son imagination lui fournit plus que sa mémoire. Il est faux dans la plupart de ses qualités, et ce qui a le plus contribué à sa réputation c'est de savoir donner un beau jour à ses défauts. Il est insensible à la haine et à l'amitié, quelque soin qu'il ait pris de paraître occupé de l'une ou de l'autre ; il est incapable d'envie ni d'avarice, soit par vertu ou par inapplication. Il a plus emprunté de ses amis qu'un particulier ne devait espérer de leur pouvoir rendre ; il a senti de la vanité à trouver tant de crédit, et à entreprendre de s'acquitter. Il n'a point de goût ni de délicatesse ; il s'amuse à tout et ne se plaît à rien ; il évite avec adresse de laisser pénétrer qu'il n'a qu'une légère connaissance de toutes choses. La retraite qu'il vient de faire est la plus éclatante et la plus fausse action de sa vie ; c'est un sacrifice qu'il fait à son orgueil, sous prétexte de dévotion : il quitte la cour, où il ne peut s'attacher, et il s'éloigne du monde, qui s'éloigne de lui. (François VI de La Rochefoucault, "Maximes")>>.


(d) Jean-François Paul de Gondi est au service de Monsieur, frère du Roi Louis XIII, pendant qu'Anne d'Autriche, mère du roi Louis XIV, assure la Régence, avec son amant, le cardinal Mazarin :


- M. Damville ou Brion <<m'entreprit, en mon particulier, avec une véhémence très digne du bon sens de la maison de Ventadour, pour me persuader que j'étais obligé, et par la haine que Monsieur le Prince avait pour moi et par les engagements que j'avais pris avec la Reine, d'empêcher que Monsieur ne joignît ses troupes à celles de M. de Nemours. Voici ce que je lui répondis, en propres termes, ou plutôt ce que je lui dictai sur ses tablettes, avec prière de les faire lire à la Reine et à Monsieur le Cardinal :

"J'ai promis de ne me point accommoder avec Monsieur le Prince ; j'ai déclaré que je ne pouvais quitter le service de Monsieur et que je ne pouvais, par conséquent, m'empêcher de le servir en tout ce qu'il ferait pour s'opposer au rétablissement de M. le cardinal Mazarin. Voilà ce que j'ai dit la Reine devant Monsieur ; voilà ce que j'ai dit à Monsieur devant la Reine, et voilà ce que je tiens fidèlement. (Cardinal de Retz, "Mémoires")>>.


(e) Alors que le coadjuteur de Paris venait d'obtenir le chapeau de cardinal, Louis XIV le fait emprisonner à Nantes. Le cardinal réussit à s'échapper en août 1654, mais il connaît l'exil de 1654 à 1662. En 1662, son retour est lié à son renoncement à l'archevêché de Paris (en échange de l'abbaye de Saint-Denis).


(f) En août 1664, c'est l'archevêque de Paris, Hardouin de Péréfixe, qui disperse douze religieuses de Port-Royal dans divers monastères et les prive des sacrements. En 1675, c'est Louis Antoine de Noailles (1651-1729) qui est archevêque de Paris, pour régler les accusations de Quiétisme qui pèsent sur Fénelon. L'expulsion de Gondi était nécessaire au roi pour en finir avec le jansénisme de Port-Royal.


(g) En 1679, Madame de La Fayette, la marquise de Sévigné et Madame de Grignan sont au chevet du cardinal, sur son lit de mort.


- <<Hélas ! mon pauvre Monsieur, quelle nouvelle vous allez apprendre, et quelle douleur j'ai à supporter ! M. le cardinal de Retz mourut hier, après sept jours de fièvre continue. Dieu n'a pas voulu qu'on lui donnât du remède de l'Anglais, quoiqu'il le demandât et que l'expérience de notre bon abbé de Coulanges fût toute chaude, et que ce fût même cette Eminence qui nous décidât, pour nous tirer de la cruelle Faculté, en protestant que s'il avait un seul accès de fièvre, il enverrait quérir ce médecin anglais. Sur cela, il tombe malade. Il demande ce remède ; il a la fièvre, il est accablé d'humeurs qui lui causent des faiblesses, il a un hoquet qui marque la bile dans l'estomac. Tout cela est précisément ce qui est propre pour être guéri et consommé par le remède chaud et vineux de cet Anglais. Mme de La Fayette, ma fille et moi, nous écrions miséricorde, et nous présentons notre Abbé ressuscité, et Dieu ne veut pas que personne décide. Et chacun, en disant: "Je ne veux me charger de rien", se charge de tout. Et enfin M. Petit, soutenu de M. Belay, l'ont premièrement fait saigner quatre fois en trois jours, et puis deux petits verres de casse, qui l'ont fait mourir dans l'opération, car la casse n'est pas un remède indifférent quand la fièvre est maligne. Quand ce pauvre Cardinal fut à l'agonie, ils consentirent qu'on envoyât quérir l'Anglais ; il vint, et dit qu'il ne savait point ressusciter les morts. Ainsi est péri, devant nos yeux, cet homme si aimable et si illustre que l'on ne pouvait connaître sans l'aimer. Je vous mande tout ceci dans la douleur de mon cœur, par cette confiance qui me fait vous dire plus qu'aux autres, car il ne faut point, s'il vous plaît, que cela retourne. Le funeste succès n'a que trop justifié nos discours, et l'on peut retourner sur cette conduite sans faire beaucoup de bruit. Voilà ce qui me tient uniquement à l'esprit. (Marquise de Sévigné, Lettre à Guitaut, Epoisse, Semur-en-Auxois, de Paris, le vendredi 25 ème août 1679)>>.



(B) Oeuvres.



(a) "La Conjuration du comte Jean-Louis de Fiesque", ouvrage diffusé sans signature, en 1639, est comme le programme politique d'un factieux.


(b) "Mémoires". A la fin de sa vie (1675), retiré à Saint-Mihiel (entre Saint-Dizier et Nancy), Jean-François Paul de Gondi rédige "La Vie du cardinal de Rais" (publication posthume, en 1717). Ses mémoires sont dédiées à la Marquise de Sévigné, qui les lui avait demandées, par une profonde amitié.


(c) Ces écrits sont l'occasion d'une méditation sur le pouvoir, sur le relativisme des observations et des témoignages, sur l'ironie de l'Histoire. On retrouvera le même thème, plus tard, dans ceux de Tolstoï,


(d) Ces mémoires sont aussi l'occasion de se retrouver, face à lui-même.


- <<Nous retournâmes au carrosse, M. de Turenne et moi, avec les éclats de rire que vous vous pouvez imaginer, et nous fîmes, lui et moi, dès le moment même, deux observations, que nous nous communiquâmes dès le lendemain matin. Il me jura que la première apparition de ces fantômes imaginaires lui avait donné de la joie, quoiqu'il eût toujours cru auparavant qu'il aurait peur s'il voyait jamais quelque chose d'extraordinaire ; et je lui avouai que la première vue m'avait ému, quoique j'eusse souhaité toute ma vie de voir des esprits. La seconde observation que nous fîmes fut que tout ce que nous lisons dans la vie de la plupart des hommes est faux. M. de Turenne me jura qu'il n'avait pas senti la moindre émotion, et il convint que j'avais eu sujet de croire, par son regard si fixe et par son mouvement si lent, qu'il en avait eu beaucoup. Je lui confessai que j'en avais eu d'abord, et il me protesta qu'il aurait juré sur son salut que je n'avais eu que du courage et de la gaieté. Qui peut donc écrire la vérité, que ceux qui l'ont sentie ? Et le président de Thou a eu raison de dire qu'il n'y a de véritables histoires que celles qui ont été écrites par les hommes qui ont été assez sincères pour parler véritablement d'eux-mêmes. Ma morale ne tire aucun mérite de cette sincérité ; car je trouve une satisfaction si sensible à vous rendre compte de tous les replis de mon âme et de ceux de mon cœur, que la raison, à mon égard, a beaucoup moins de part que le plaisir dans la religion et l'exactitude que j'ai pour la vérité. ("La Vie du cardinal de Rais")>>.


(e) Les "Mémoires" sont encore un témoignage littéraire du classicisme à la française.


(f) Ces portraits sont clairs. Le trait est précis.


- Ainsi celui de Anne de Gonzague, princesse palatine (1616-1684). La belle frondeuse est la fille de Louis de Gonzague-Nevers, la sœur de Charles de Gonzague-Nevers, duc de Nevers et de Mantoue :


- <<Elle estimait autant la galanterie qu'elle en aimait le solide. Je ne crois pas que la reine Elizabeth d'Angleterre ait eu plus de capacité pour conduire un État ; je l'ai vue dans la faction, je l'ai vue dans le cabinet, et je lui ai partout trouvé de la sincérité. ("La Vie du cardinal de Rais")>>.


- A propos des relations de la duchesse de Longueville et de ses frères cadets, le prince de Condé et le prince de Conti :


- <<Mlle de Bourbon avait eu l'amitié du monde la plus tendre pour monsieur son frère aîné ; et Mme de Longueville, quelque temps après son mariage, prit une rage et une fureur contre lui, qui passa jusques à un excès incroyable. Vous croyez aisément qu'il n'en fallait pas davantage dans le monde pour faire faire des commentaires fâcheux sur une histoire de laquelle l'on ne voyait pas les motifs. Je ne les ai jamais pu pénétrer ; mais j'ai toujours été persuadé que ce qui s'en disait dans la cour n'était pas véritable, parce que si il eût été vrai qu'il y eût eu de la passion dans leur amitié, Monsieur le Prince n'aurait pas conservé pour elle la tendresse qu'il y conserva toujours dans la chaleur même de l'affaire de Coligny. J'ai observé qu'ils ne se brouillèrent qu'après sa mort, et je sais, de science certaine, que Monsieur le Prince savait que madame sa sœur aimait véritablement Coligny. L'amour passionné du prince de Conti pour elle donna à cette maison un certain air d'inceste, quoique très injustement pour l'effet, que la raison au contraire que je viens de vous alléguer, quoique, à mon sens, décisive, ne put dissiper. ("La Vie du cardinal de Rais")>>.


(g) Voir Du monde. Figures de rhétorique. L'homme du monde. Louis II de Bourbon-Condé. Non seulement. Monsieur. Palais du Té. Port-Royal. Société du spectacle.



(B) Parenté.



(a) Les alliances des Gondi sont nombreuses en Bretagne et en Normandie.


(b) Equilly est à l'est de Granville et au nord d'Avranches. Pour l'histoire littéraire et touristique. René de Vassé, sieur d'Ecquilly, cousin germain de Jean-François Paul de Gondi, vient lire L'Astrée, la pastorale d'Honoré d'Urfé sur les terres la Bastie d'Urfé.


(c) Vassé est aussi prêt à aider son cousin à épouser secrètement Mademoiselle de Rais, plutôt que de le voir rester dans les ordres :


- <<Je trouvai Ecquilly, oncle de Vassé et mon cousin germain, que j'ose assurer avoir été le plus honnête homme de son siècle. Il avait vingt ans plus que moi, mais il ne laissait pas de m'aimer chèrement. Je lui avais communiqué, avant mon départ, la pensée que j'avais d'enlever Mlle de Rais, et il l'avait fort approuvée, non seulement parce qu'il la trouvait fort avantageuse pour moi, mais encore parce qu'il était persuadé que la double alliance était nécessaire pour assurer l'établissement de la maison. ("La Vie du cardinal de Rais")>>.


(d) Monsieur Du Fargis, embastillé, est marié à une sœur de la mère de Jean-François Paul de Gondi. Mme Du Fargis est dame d'atour de la reine Anne d'Autriche, épouse de Louis XIII. C'est elle qui prévient Marie de Médicis d'une lettre d'amour du cardinal de Richelieu à sa belle-fille. La Rochepot, fils de Mr et Mme Du Fargis est son cousin germain et son ami intime. Il est au service de Monsieur, duc d'Orléans.


(d) Madame de Maignelais est sa tante. Elle est souvent à l'hôtel de Vendôme, chez Mme de Vendôme, où Gondi fait des sermons devant Turenne. Elle fait partie des gens dévots. Sans le savoir, elle contribue à répandre l'argent qui finance la sédition contre Mazarin dans Paris.


- <<Monsieur le Comte m'avait fait toucher douze mille écus par les mains de Duneau, l'un de ses secrétaires, sous je ne sais quel prétexte. Je les portai à ma tante de Maignelais, en lui disant que c'était une restitution qui m'avait été confie par un de mes amis, à sa mort, avec ordre de l'employer moi-même au soulagement des pauvres qui ne mendiaient pas ; que comme j'avais fait serment sur l'Evangile de distribuer moi-même cette somme, je m'en trouvais extrêmement embarrassé, parce que je ne connaissais pas les gens, et que je la suppliais d'en vouloir bien prendre le soin. Elle fut ravie ; elle me dit qu'elle le ferait très volontiers ; mais que, comme j'avais promis de faire moi-même cette distribution, elle voulait absolument que j'y fusse présent, et pour demeurer fidèlement dans ma parole, et pour m'accoutumer moi-même aux oeuvres de charité. C'était justement ce que je demandais, pour avoir lieu de me faire connaître tous les nécessiteux de Paris. Je me laissais tous les jours comme traîner par ma tante dans des faubourgs et dans des greniers. Je voyais très souvent chez elle des gens bien vêtus, et connus même quelquefois, qui venaient à l'aumône secrète. La bonne femme ne manquait presque jamais de leur dire : "Priez bien Dieu pour mon neveu ; c'est lui de qui il lui a plu de se servir pour cette bonne oeuvre." Jugez de l'état où cela me mettait parmi les gens qui sont, sans comparaison, plus considérables que tous les autres dans les motions populaires. Les riches n'y viennent que par force ; les mendiants y nuisent plus qu'ils n'y servent, parce que la crainte du pillage les fait appréhender. Ceux qui y peuvent le plus sont les gens qui sont assez pressés dans leurs affaires pour désirer du changement dans les publiques, et dont la pauvreté ne passe toutefois pas jusques la mendicité publique. Je me fis donc connaître à cette sorte de gens, trois ou quatre mois durant, avec une application toute particulière, et il n'y avait point d'enfant au coin de leur feu à qui je ne donnasse toujours, en mon particulier, quelque bagatelle : je connaissais Nanon et Babet. Le voile de Mme de Maignelais, qui n'avait jamais fait d'autre vie, couvrait toute chose. Je faisais même un peu le dévot, et j'allais aux conférences de Saint-Lazare. ("La Vie du cardinal de Rais")>>.


(e) Madame de Maignelais contribue à sauver, par le couvent, une pauvre et belle fille, que la misère et les coutumes de l'époque conduisaient à la prostitution.


- <<Un peu après que je fus sorti du collège, ce valet de chambre de mon gouverneur qui était mon tercero me trouva, chez une misérable épinglière, une nièce de quatorze ans, qui était d'une beauté surprenante. Il l'acheta pour moi cent cinquante pistoles, après me l'avoir fait voir ; il lui loua une petite maison à Issy ; il mit sa sœur auprès d'elle ; et j'y allai le lendemain qu'elle y fut logée. Je la trouvai dans un abattement extrême, et je n'en fus point surpris, parce que je l'attribuai à la pudeur. J'y trouvai quelque chose de plus le lendemain, qui fut une raison encore plus surprenante et plus extraordinaire que sa beauté et c'était beaucoup dire. Elle me parla sagement, saintement, et sans emportement : toutefois elle ne pleura qu'autant qu'elle ne put pas s'en empêcher ; elle craignait sa tante à un point qui me fit pitié. J'admirai son esprit, et après j'admirai sa vertu. Je la pressai autant qu'il le fallut pour l'éprouver. J'eus honte pour moi-même. J'attendis la nuit pour la mettre dans mon carrosse ; je la menai à ma tante de Maignelais, qui la mit dans une religion, où elle mourut huit ou dix ans après en réputation de sainteté. Ma tante, à qui cette fille avoua que les menaces de l'épinglière l'avaient si fort intimidée qu'elle aurait fait tout ce que j'aurais voulu, fut si touchée de mon procédé, qu'elle alla, dès le lendemain, le conter à Monsieur de Lisieux, qui le dit, le jour même au Roi, son dîner. (Cardinal de Retz, "La Vie du cardinal de Rais")>>.


(f) C'est en partie à ce fait que Gondi doit d'avoir été nommé coadjuteur par Louis XIII.


- <<Un an devant cette première aventure, j'étais allé courre le cerf à Fontainebleau, avec la meute de M. de Souvré, et comme mes chevaux étaient fort las, je pris la poste pour revenir à Paris. Comme j'étais mieux monté que mon gouverneur et qu'un valet de chambre, qui couraient avec moi, j'arrivai le premier à Juvisy, et je fis mettre ma selle sur le meilleur cheval que j'y trouvai. Coutenant, capitaine de la petite compagnie de chevau-légers du Roi, brave, mais extravagant et scélérat, qui venait de Paris aussi en poste, commanda à un palefrenier d'ôter ma selle et d'y mettre la sienne. Je m'avançai en lui disant que j'avais retenu le cheval ; et comme il me voyait avec un petit collet uni et un habit noir tout simple, il me prit pour ce que j'étais en effet, c'est-à-dire pour un écolier, et il ne me répondit que par un soufflet, qu'il me donna à tour de bras, et qui me mit tout en sang. Je mis l'épée à la main et lui aussi ; et dès le premier coup que nous nous portâmes, il tomba, le pied lui ayant glissé ; et comme il donna de la main, en se voulant soutenir, contre un morceau de bois un peu pointu, son épée s'en alla aussi de l'autre côté. Je me reculai à deux pas, et je lui dis de reprendre son épée ; il le fit, mais ce fut par la pointe, car il m'en présenta la garde en me demandant un million de pardons. Il les redoubla bien quand mon gouverneur fut arrivé, qui lui dit qui j'étais. Il retourna sur ses pas ; il alla conter au Roi, avec lequel il avait une très grande liberté, toute cette petite histoire. Elle lui plut, et il s'en souvint en temps et lieu, comme vous le verrez encore plus particulièrement à sa mort. (Cardinal de Retz, "La Vie du cardinal de Rais")>>.


- <<Mme de Maignelais et Monsieur de Lisieux demandèrent la coadjutorerie pour moi, et la Reine la leur refusa, en disant qu'elle ne l'accorderait qu'à mon père, qui ne voulait point du tout paraître au Louvre. Il y vint enfin une unique fois. La Reine lui dit publiquement qu'elle avait reçu ordre du feu Roi, la veille de sa mort, de me la faire expédier, et qu'il lui avait dit, en présence de Monsieur de Lisieux, qu'il m'ait toujours eu dans l'esprit, depuis les deux aventures de l'épinglière et de Coutenant. Quel rapport de ces deux bagatelles à l'archevêché de Paris ? et voilà toutefois comme la plupart des choses se font. (Cardinal de Retz, "La Vie du cardinal de Rais")>>.


(g) Le maréchal de Schomberg a épousé en premières noces la cousine germaine du coadjuteur. Le duc d'Halluin, fait chevalier de l'ordre du roi, le 15 mai 1633, est le fils du maréchal de Schomberg, envoyé par Richelieu comme ambassadeur en Allemagne.


(h) Beau-frère du maréchal de La Meilleraye, Monsieur de Brissac est marié à une cousine de Gondi. Parmi ses ancêtres, Charles de Cossé (1505-1563), comte de Brissac, est maréchal de France. Le 15 mai 1633, le duc de Brissac est fait chevalier de l'ordre du roi.


(i) Voir Génération de L'Astrée. Louis XIV.






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Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Mercredi 18 Juin 2008



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