Hautes Chaumes


(a) <Hautes Chaumes> est un terme de géographe. On parle des Hautes Chaumes des ballons des Vosges. En Forez, les Hautes Chaumes sont les Chals qui entourent le sommet de Pierre-sur-Haute (1634 m). Le terme désigne le plus élevé des étages de la végétation dans les monts du Forez. Le 18 Mars 1993, une partie des Hautes Chaumes des communes de Job et de Valcivières a été classée pour son intérêt scientifique, culturel et touristique. C'est le domaine de la jasserie et du pâturage d'estive.


(b) A la limite inférieure des Hautes Chaumes, il n'est pas rare de trouver du lichen des rennes aux branches des pins, des sapins et du sorbier des oiseleurs. En prolongeant la promenade du lieu-dit les Chambons vers Glizieux puis la Grande Pierre Bazanne, on en trouvera de grandes quantités. Ce témoin de l'air pur n'est pas un parasite pour les arbres.


(c) Au-dessus de 1 300 mètres (parfois moins à cause du vent violent ou de l'exposition au nord), on est dans l'étage subalpin. L'altitude n'est plus très favorable à la forêt, surtout si l'homme s'y oppose. Les Hautes Chaumes sont parfois coupées d'une végétation arbustive. Les creux, plus humides (ruissellement et formation de congères hivernales) et protégés du vent (qui accentue le froid) abritent des saules et le sorbier des oiseleurs. Ce territoire est particulièrement visible entre la Grande Pierre Bazanne (1694 m) et les jasseries de Garnier (1336 m). C'est le monde des pasteurs et des cavaliers. Selon le sol et l'humidité, on y trouve des groupements de genêts (en montant à Garnier), des landes à callunes (la bruyère), des gentianes (au col du Béal), des myrtilles ou des tourbières (au col de Baracuchet). Cet étage supérieur ne pourrait pas accueillir durablement les activités humaines. C'est pourquoi les Hautes Chaumes ne sont traditionnellement exploitées (fabrication de la fourme) qu'en été.


(d) La fumade des prés, les fumées, en aval des loges de jasserie a contribué à la bonification des sols. La fauche et le broutage ont exercé une pression de sélection sur les espèces végétales. Depuis 1976, année de sécheresse, les tracteurs montent de plus en plus souvent fumer les prés (le lisier des élevages de porc) ou faire du regain d'ensilage.


(e) D'après les pollens des tourbières (incluant les céréales de basse altitude), la forêt regagne le terrain perdu pendant l'épisode glaciaire du Quaternaire, entre 11 000 et 8 000 B.P. (avant nous, Before Present). On constate une déforestation à partir du Néolithique et à nouveau pendant la période romaine (camps romains en altitude).


(f) Cette déforestation dans les monts du Forez a son équivalent dans les Alpes, à la fin de l'âge du bronze. Sous la poussée des envahisseurs celtes, les autochtones (Ligures ?) se replient vers les zones d'altitude dont ils déboisent une partie des forêts. En été, ils utilisent aussi l'étage des alpages, où l'arbre, qui nest pas dans son climax, ne pousse plus.


- <<A la fin de l'âge du Bronze, une déforestation en altitude permet d'accroître terroirs et alpages nécessaires à l'occupation permanente dans les massifs internes, déforestation bien visible dans les pollens de tourbières (Valloire en Maurienne, A. Bocquet, 1994). Aux VIIe/VIe siècles, cette conquête de la montagne s'intensifie avec des caractères très particuliers : absence d'armes, absence d'objets en fer, inhumations plates en coffres de lauzes et abondance exceptionnelle des parures en bronze de fabrication locale complétée par des importations d'ambre et de bijoux "exotiques" venus des deux côtés des Alpes (A. Bocquet, 1991). Cette civilisation d'altitude est archéologiquement bien mieux connue que la civilisation qui tenait les plaines de piedmont et les massifs subalpins : il n'est que de voir la densité des découvertes faites pour la plupart au XIXe siècle. Elle aura son apogée aux Ve/IVe siècles av. J.-C. et trouvera sa richesse dans le trafic transalpin mis en place par les Hallstattiens, dès le VIIe siècle, dans leur besoin de commercer avec l'Italie ; la connaissance des chemins, le portage des charges, les escortes de convois et les péages sont une source de revenus abondants. Sur les pistes ou les sentiers de haute montagne tout transport se fait à dos d'homme ou de bêtes de somme que ce soit pour les échanges locaux ou pour le compte de marchands étrangers ; d'autant que sur ces pistes seules passaient sans difficultés les bêtes du pays, "habituées aux parcours périlleux" ainsi que le dit Strabon (G. Barruol 1969, p. 101). Les ressources locales sont aussi exploitées comme le sel, le cuivre, le plomb, le bois, le bétail, les fromages, etc. Mais ces peuples rustiques étaient méfiants vis à vis des étrangers et hostiles à toute incursion qu'ils savaient neutraliser, même sans armes, par la seule utilisation intelligente des moyens simples que la nature mettait à leur disposition dans des reliefs tourmentés : Hannibal et plus tard les Romains en feront la dure expérience pour traverser les Alpes... Ils savaient ne pas mélanger commerce et passage en force ! Ces peuples alpins ne sont pas confondus avec les tribus celtes ou gauloises et des études récentes ont démontré leur originalité (A. Bocquet, 1991), déjà constatée par les historiens antiques eux-mêmes : Polybe (IIe siècle av. J.C.) raconte que les populations alpines sont différentes de celles des vallées du Rhône et du Pô. D'après Strabon (Ier siècle av. J.C.) "la Gaule cisalpine est habitée par des nations ligures et des nations celtiques ; celles-là demeurant dans les montagnes, celles-ci dans les plaines" ; on peut admettre qu'il en était de même pour le versant occidental des Alpes. Tite-Live (Ier siècle ap. J.C.) précise que les Alpes occidentales n'étaient pas peuplées de Gaulois mais d'autochtones, que les contacts entre Alpins et Celtes étaient fréquents car "les Gaulois sont fort peu éloignés par leur langue et par leurs mœurs de ces montagnards". L'originalité des productions métalliques, un rite funéraire spécifique et d'autres particularités s'accordent ainsi avec les textes sur la dualité des populations, les montagnards autochtones (que G. Barruol appelle les "peuples indépendants ") d'un côté et les Gaulois des plaines et du piedmont de l'autre. Auguste qui a vaincu les peuples alpins entre 18 et 15 av. J.-C., a fait inscrire leurs noms sur le Trophée de la Turbie, près de Nice : Medulli de Maurienne, Ucenii de l'Oisans et on remarquera l'absence de Ceutrones. (Aimé Bocquet, "Allobroges et Allobrogie", document du web, Naissance de la "civilisation alpine")>>.


(g) Voir Ager. Disparition des Hautes Chaumes. Du jas aux jasseries. Empire des Gaules. Formation des Hautes Chaumes. Glaciers du Forez. Goutte de l'Oule. Hauts des monts du Forez. Hortus. Le partage de la montagne de Roche. La Grande Histoire des Scieurs de Long. Les Jasseries des Monts du Forez. Montagne d'estive. Montagne de Bazanne. Montagne pastorale. Saltus. Sylva. Vu de Météo-SAT.




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Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Dimanche 6 Juillet 2008



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