Terme d'hydrologie.
(a) Un méandre est une boucle, une forme sinueuse, vaguement sinusoïdale. Les méandres sont une des formes de l'écoulement linéaire d'un cours d'eau. Ils résultent de l'arrondissement des bifurcations imposées au cours d'eau par les obstacles de son lit mineur. Les méandres sont une forme de lissage de courbe. De nombreux fleuves, dont le Rhin et le Pô, forment des méandres quand leur pente diminue alors que leur charge alluvionnaire est importante.
(b) Un méandre ne vient jamais seul. Les méandres successifs forment des trains. Les méandres d'un même train ont une largeur voisine. Ils produisent une sinuosité du lit du cours d'eau. En présence de méandres, le lit réel est plus long (une fois et demi, en moyenne) que la distance parcourue en ligne droite. Ceci atténue encore la pente réelle.
(c) En plaine alluviale (roches sédimentaires tendres comme l'argile, le gore ou les marnes), on trouve des méandres libres. Des rivières comme le Lignon modifient régulièrement le dessin de leurs méandres. Les méandres ont tendance à s'élargir et à se déplacer vers l'aval. Vient un moment où un méandre modifié coupe un ancien méandre. Se forme alors un petit lac, en forme de croissant (un lac-croissant), dans le méandre abandonné. Les anciens méandres du Lignon se lisent dans les limites des communes de Sainte-Agathe-la-Bouteresse et de Saint-Etienne-le-Molard avec leurs voisines méridionales (Trelins et Montverdun). Le Gourd du Croel est un ancien méandre, délaissé par la Loire, près de Bigny.
(d) Dans les plateaux de roches dures (granite, gneiss, calcaire, etc), on trouve des méandres encaissés, dont le cours d'eau ne peut souvent plus sortir. De manière générale, cette mémoire du tracé transforme le ruissellement généralisé (pendant la pluie, la fonte des glaces et les inondations) en un écoulement linéaire. Le plus souvent, l'hydrographie étudie des organismes linéaires (arborescences de cours d'eau hiérarchisés) par opposition à des organismes diffus (réseaux de chenaux dans des marais périglaciaires). C'est la limnologie qui étudie les lacs et les marais.
(c) Des méandres se forment quand la pente est faible et que le cours d'eau charrie beaucoup de matériaux. Le ralentissement du cours d'eau réduit sa compétence alluviale. Le cours d'eau dépose des matériaux. Ceux-ci encombrent son lit, le haussent et l'obligent à les contourner. Mais la courbure de la trajectoire du cours d'eau crée une dissymétrie entre ses rives. Les matériaux grossiers, mus par la force centrifuge, érodent une rive. Les matériaux légers, moins abrasifs, se déposent dans la corde de la boucle. La sédimentation se fait sur le bord convexe d'un méandre. L'érosion s'effectue sur le bord concave. L'érosion tend à élargir le méandre vers l'extérieur. La sédimentation le déplace vers l'aval. Leurs effets conjugués modifient le lit mineur du cours d'eau. La sédimentation se fait vers l'intérieur et l'amont. Elle tend à hausser une partie du lit, tandis que l'érosion creuse à côté. Ainsi s'explique le déplacement des méandres du Lignon depuis l'écriture de "L'Astrée" d'Honoré d'Urfé et encore depuis la constitution des communes par la Révolution française. De même, aux Etats-Unis, les méandres actuels du Mississippi (en bleu sur la carte) ne se sentent pas obligés de suivre les méandres de la frontière (en rose sur la carte) entre l'Etat du Mississippi (à l'est) et de celui de l'Arkansas (à l'ouest).
(d) Mais le débit d'un cours d'eau n'est pas régulier dans le temps. Le lit mineur est largement suffisant pour l'étiage. Le cours d'eau déborde dans son lit majeur en période de crue. C'est aussi là qu'il laisse les matériaux les plus massifs, que seule la crue a la compétence de déplacer. En période de crue, le cours d'eau sort de son lit mineur. Il n'y revient pas toujours à la fin de l'épisode. Il peut s'installer dans une zone plus basse que celle que la sédimentation haussait depuis la dernière crue.
(e) En fait, quand la pente est réduite, un cours d'eau ne creuse pas son fond en permanence. Il passe beaucoup de temps à effectuer une érosion relative sur le résultat de sa propre sédimentation. Mais les éléments les plus massifs ne sont transportables qu'en situation de crue. Les gravières de la plaine du Forez sont établies dans d'anciens méandres de la Loire.
(f) Méandres océaniques. Les bouées dérivantes suivies par satellites ont mis en évidence l'existence de méandres, dans les courants des océans. Comme les méandres fluviaux, ils accroissent leur amplitude et se déplacent vers l'aval du courant. Des anneaux (chauds ou froids), isolés du courant principal (le Gulf Stream, par exemple) peuvent se maintenir pendant plusieurs mois.
(g) Méandres aériens. Les météorologues ont mis en évidence l'existence de méandres dans les courants atmosphériques. Le jet-stream de chaque hémisphère (parfois dédoublé) qui se déplace d'ouest en est en altitude n'a pas toujours un déplacement zonal. Comme un serpent, le courant-jet peut avancer tout en faisant des ondulations. Il contourne alors des zones de haute pression et des zones de basse pression.
(h) La formation de méandres est donc commune à de nombreux écoulements.
(i) Nous avons observé les méandres du haut ruisseau de Chorsin au cours d'une randonnée photographique. Ceux du Lignon font l'objet des recherches sur la localisation de l'ancien Pont de la Bouteresse.
(j) A Montbrison, le Vizézy fait un méandre, avant de passer sous le Boulevard, devant l'Hôtel du Lion d'Or. Le lit du ruisseau étant bordé de murs de pierres, il n'y aura pas de création réelle de méandre. Néanmoins, par le dépôt de limon dans l'intérieur de la courbe, on peut observer le mécanisme qui (sans ses murs) entraînerait un déplacement (centrifuge) du méandre.
(k) Etymologie. <Méandre> est un nom propre qui est devenu un nom commun. Le fleuve Méandre (actuel Gediz) coule dans le pays qui, aujourd'hui, se nomme Turquie. Le dieu Marsyas incarnait la source principale du Méandre. Le Méandre donne sa fécondité à une vallée fertile. Fondateur des Séleucides, Antiochos I er, fils de Séleucos (général d'Alexandre le Grand), refonde la ville de Kélainai, aux sources du Méandre. Antiochos donne à la ville le nom <Apamée>, d'après le nom de sa mère, la princesse bactrienne Apama. Au IV ème siècle avant Jésus-Christ, les habitants de Priène installent leur ville sur un nouveau site, plus élevé. Au prix de terrassements considérables, sur des collines irrégulières, ils se mettent à l'abri des alluvionnements du Méandre.
(l) Métaphore. On parle volontiers des méandres d'un roman ou de ceux de l'histoire contée par la Bible. Mais l'image semble avoir une origine beaucoup plus profonde. Toute création, littéraire, philosophique ou scientifique, est un frayage.
- <<Ruissellement, partages des eaux, confluences, puis apaisement dans les méandres et perte dans le sable des deltas, autant de métaphores fluviales qui ne font que décrire l'émergence fondatrice d'une oeuvre d'art. Toute oeuvre est eau vive qui creuse dans le tuf de la matière mortelle le grand bassin fluvial dont le courant donne sens à la vie individuelle ou sociale. (Encyclopédia Universalis, article "Création littéraire")>>.
(m) Motif artistique. Vers 950 avant Jésus-Christ, dans la poterie des ateliers d'Athènes, les motifs se font plus variés (méandres, svastikas, hommes et animaux stylisés).
(n) Une rivière du Canada a reçu le nom de Meander River.
(o) Voir Bactriane. Cycle de l'eau. Erosion et sédimentation. Mise en abyme. Pont. Posidonios. Précipitations. Ramification.
(p) Parmi les randonnées photographiques sur les Hauts des monts du Forez :
- "Ruisseau de Chorsin".
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Mis en ligne le Lundi 14 Juillet 2008.
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