En Forez.
(a) Le Lignon est une rivière des monts du Forez. La rivière est formée par la confluence d'un assez grand nombre de ruisseaux dont plusieurs portent le nom de ruisseau du Lignon. Les sources de ces différents ruisseaux sont réparties sur les communes de Saint-Bonnet-le-Courreau, Sauvain, Chalmazel et Jeansagnières. Ces communes sont réunies dans la Communauté Rurale du Haut-Lignon. La ligne des crêtes d'où descendent ces ruisseaux va du col de la Loge (1253 m) à la Roche Gourgon (1420 m), en passant par le col du Béal (1390 m) et Pierre-sur-Haute (1634 m).
(b) Les deux ruisseaux de Lignon se rejoignent entre Chalmazel et Sauvain, vers le pont de Chevelière. C'est entre Sauvain et Saint-Georges-en-Couzan que l'apport du ruisseau de Pierre Brune augmenté de celui du ruisseau de Chorsin forme le Lignon. Celui-ci coule par les gorges de Sail-sous-Couzan vers la plaine du Forez qu'il rejoint à Boën-sur-Lignon. La force d'érosion supérieure du Lignon sur le Vizézy a donné au ruisseau de Chorsin une pente et une capacité d'érosion que son voisin, le ruisseau de Goutte Fière, tributaire du Vizézy, n'avait pas. Les seigneurs de Sail qui dépendaient de l'empereur germanique et les comtes de Forez qui rendaient l'hommage lige au roi de France, se livraient à une guerre de l'eau. L'enjeu était d'alimenter les moulins du Lignon et les moulins du Vizézy. Au coeur de ce dispositif, ce qui est aujourd'hui la commune de Saint-Bonnet-le-Courreau, joue un rôle considérable. C'est probablement pourquoi elle est la plus grande commune du département ligérien. D'un côté elle forme un balcon sur Montbrison. De l'autre, par les jasseries de Garnier, elle contrôle le passage vers la ligne des crêtes, toujours stratégique. Ainsi s'explique l'importance du béal comtal.
(c) A Boën commence un Lignon plus tranquille, celui du pays de L'Astrée. A la fonte des neiges ou après des pluies d'orage, il manifeste pourtant des crues très importantes aux alentours de la Bastie d'Urfé. C'est là qu'abandonné par l'Astrée, une belle bergère trompée par un fourbe, Céladon se jette à l'eau pour mettre fin à son tourment. Alimenté par le Vizézy à Poncins, le Lignon se jette ensuite dans la Loire à Cleppé.
(d) Le Lignon dessine des méandres. Dans "L'Astrée", le sage et savant druide Adamas explique par l'instabilité du cours du Lignon, pourquoi un tableau ancien ne correspond pas au paysage actuel des bords de la rivière.
- <<c'est que quelques arbres depuis ce temps-là sont morts, et d'autres creux, que la rivière en des lieux s'est avancée, et reculée en d'autres, et toutefois il n'y a guère de changement. (Adamas, en son château de Goutelas, dans "L'Astrée")>>.
(e) Pendant le siècle de Louis XIV, au cours des bals masqués, la génération de L'Astrée aime à s'habiller comme les bergers du Lignon.
- <<Le lendemain je fus au bal chez Monsieur, qui [fut] fort agréable, comme à l'ordinaire. Tout le monde étoit paré, hors moi : on m'en fit fort la guerre. Je m'excusai sur ce que je ne faisois que d'arriver ; mais la vérité étoit que je crains fort de me parer, et que j'ai tant de confiance en ma bonne mine, que je crois qu'elle me pare plus que tous les diamants de mille créatures qui ne sont pas faites comme moi. Le carnaval fut court pour nous ; car la cour n'arriva qu'au commencement de février, et moi le 6 [du même mois]. On se déguisa souvent ; nous fîmes une mascarade la plus jolie du monde. Monsieur, mademoiselle de Villeroy, mademoiselle de Gourdon et moi, étions habillées de toile d'argent blanche fort chamarrée de dentelles d'argent, et des passepoils couleur de rose, et des tabliers et des pièces de velours noir avec de la dentelle d'or et d'argent ; l'habit échancré à la bressane, et des collerettes et manchettes à leur mode, de toile jaune, un peu plus fines que leurs, avec du point de Venise ; des chapeaux de velours noir tout couverts de plumes couleur de rose et blanc, et le corps lacé de perles rattachées de diamants ; et partout des perles et des diamants ; c'étoit ma parure. Monsieur et mademoiselle de Villeroy étoient tout de diamants, et Gourdon d'émeraudes. Nous étions coiffées à la paysanne de Bresse, avec des cheveux noirs, des houlettes de vernis couleur de feu, garnies d'argent. Les bergers étoient le duc de Roquelaure, le comte de Guiche, Péguilain [Lauzun] et le marquis de Villeroy, qui étoient très-bien vêtus. Jamais mascarade n'a été si magnifique ni si agréable. La reine nous trouva fort à sa fantaisie ; ce qui n'est pas peu : car elle est fort difficile à ces choses-là. Nous allâmes à l'Arsenal : la maréchale de La Meilleraye donnoit une grande assemblée ; mais il y avoit une si furieuse quantité de monde que l'on ne s'y pouvoit tourner, quoique la salle fût grande. Nous fûmes contraints d'aller dans une autre chambre et d'y faire venir des violons et quelques dames pour faire un second bal. Le roi y étoit aussi, habillés en vieillard et en vieilles toute leur troupe. Il vint quantité d'autres masques ; mais comme ils ne se démasquent pas d'ordinaire, on ne les connut point. Nous nous habillâmes encore une fois de la même manière ; la reine le voulut. Nous fûmes encore à l'Arsenal ; mais c'étoit à l'appartement de madame d'Oradoux [près de Clermont-Ferrand], femme d'un lieutenant de l'artillerie, cousin du maréchal de La Meilleraye, où étoit le bal ; il y avoit grand ordre à celui-là et peu de presse et beaucoup de place. Aussi on nous regarda et loua fort ; ce qui nous fit plaisir ; car on avoit eu assez de peine à s'habiller pour en avoir un remerciment. Le roi y vint avec sa troupe ordinaire, avec des habits qu'il leur avoit donnés de brocard d'or [et] d'argent, avec de la broderie, enfin des habits magnifiques, mais sans invention ; aussi nous pauvres petites bergères des bords du Lignon (car elles sont habillées, à ce que je crois, comme les Bressanes) parûmes plus, par nos agréments et notre propreté, que ces divinités avec tout leur or et leur pourpre. (Grande Mademoiselle, "Mémoires de Mademoiselle de Montpensier, petite-fille de Henri IV", Partie 1, Chapitre 34)>>.
(f) Référence littéraire :
- <<Ce bon élixir, le Café
Met dans nos coeurs sa flamme noire ;
Grâce à lui, fier de sa victoire,
L'esprit subtil a triomphé.
Faux Lignon que chantait d'Urfé,
Tu ne nous en fais plus accroire ;
Ce bon élixir, le Café
Met dans nos coeurs sa flamme noire.
Ne faisons qu'un autodafé
Des vieux mensonges de l'Histoire ;
Et mêlons, sans peur du grimoire,
A notre vieux sang réchauffé,
Ce bon élixir, le Café.
(Théodore de Banville, 1823-1891, "Le café", in Rondeaux, 1875)>>.
(g) Voir Cher Lignon. Forez de L'Astrée. Goutte. La Sylvanire. Papire Masson. Pont de la Bouteresse. Sources du Lignon.
(h) Galerie d'images sur Internet : "Ruisseau de Chorsin".
(i) Parmi les randonnées photographiques sur les Hauts des monts du Forez ou dans le Forez de L'Astrée :
- "Ruisseau de Chorsin" ;
- "Combes", le château au pied du Mont-d'Uzore ;
- "Pont de la Bouteresse".
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Mis en ligne le Lundi 14 Juillet 2008.
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