Les Jasseries des Monts du Forez
(a) L'ouvrage "Les Jasseries des Monts du Forez", de Maurice Damon, est un essai de "sociologie de la vie pastorale". Cette thèse de doctorat de 3 ème cycle en sociologie rurale a été soutenue à l'Université Lyon II, en mai 1971.
(b) L'argumentation principale de la thèse peut se résumer ainsi : L'idée, parfois exprimée, d'une exploitation collective ou communautaire des Hautes Chaumes, est une illusion. Chaque jasserie s'inscrit dans une exploitation familiale autonome. La jasserie est un élément pastoral saisonnier, dans une exploitation agricole familiale où la culture, le propriétaire et l'homme adulte dominent respectivement l'élevage, le domestique, la femme et les enfants. Le but de la jasserie est la production de la fourme. Ce produit commercialisable fournit une ressource monétaire à l'exploitation familiale d'altitude. Contrairement aux exploitations de basse altitude, celles des hauts des monts du Forez ne peuvent vendre de blé. Avec le beurre, la fourme est le seul surplus commercialisable. Les jasseries des grosses maisons sont tenues par des domestiques. Il s'agit souvent d'un couple marié, constitué d'un vacher et d'une vachère. Les jasseries des petites maisons sont tenues par la mère de famille, une de ses filles et les jeunes enfants. La mère de famille produit le beurre et la fourme. Les jeunes gardent le troupeau dans la montagne. Chaque fourme exige 20 litres de lait. On ne peut tenir une jasserie et produire des fourmes qu'avec un troupeau suffisant. L'organisation du terrain (la montagne, le béal, la bonde, la loge, les fumées) et du travail visent aussi à produire une certaine quantité de bon foin ou d'herbe riche, grâce à la bonde, au lavage de l'étable et à la fumure animale des fumées, situées sous la loge. Les hommes restent au village pour les foins, les moissons et les labours. Une fille reste avec eux, pour s'occuper de la maison. Les hommes montent à la jasserie pour la partie agricole (labourer, creuser les razes ou curer les béals), forestière (exploitation du bois au bas des fumées) ou commerciale (vente ou transport des fourmes et des bêtes) des activités de la montagne. Seules les grosses maisons emploient des domestiques ("valets" cultivateurs ou "vachers" pastoraux). Les domestiques (hommes ou femmes) viennent des petites maisons. Les domestiques contribuent à la perpétuation de leur maison d'origine (tenue par l'aîné, héritier universel) et au prestige de leur maison d'emploi. Le versant forézien contient plus de grosses maisons (jasseries de Garnier tenues par de grosses maisons de Courreau, partie pastorale de Saint-Bonnet-le-Courreau) que le versant auvergnat (nombreuses petites maisons de Valcivières qui ne peuvent tenir que par la jasserie ou un artisanat complémentaire) des monts du Forez. C'est la disparition des domestiques, attirés par les emplois salariés de la ville, qui a provoqué l'effondrement rapide du monde des jasseries sur la montagne. Faute de domestiques, les jasseries des grosses maisons foréziennes ont disparu les premières. Certains vachers ont repris ces jasseries (bâtiment, pâturage, matériel, cheptel) à leur compte, avec un contrat de "chetail", dans le but ou l'espoir de commencer, sur cette base pastorale, la constitution d'une véritable exploitation paysanne (avec ajout progressif de terres cultivables, louées puis possédées). Abandonnant leurs jasseries et leurs domestiques, les grosses maisons (surtout en Forez) ont abordé plus rapidement la mécanisation agricole et pastorale. Quand elles le pouvaient, les petites maisons (surtout en Auvergne) ont récupéré des terres cultivables et des pâturages pour accroître leur taille. Ainsi s'explique la persistance des burons auvergnats dans l'entre-deux guerre, quand nombre de belles jasseries foréziennes avaient déjà disparu. Puis la concurrence du mode de vie urbain et l'exode rural ont fait disparaître toutes les jasseries. La spécialisation des exploitations d'altitude dans la production de lait s'est accompagné d'un ramassage quotidien et d'une fabrication industrielle de la fourme par les laiteries. La disparition des jasseries réduit la complémentarité entre grosses maisons et petites maisons agricoles.
(c) Voir Acte Desmier. Acte pastorali. Communes à jasseries. Disparition de l'estive en jasseries. Du jas aux jasseries. Estive. Exclusion du troupeau. Fabrication de la fourme. Fait en femme. Foins et pailles. Fourme familiale. Fumées. Héritier universel. Hiérarchies des travaux agricoles. Illusion communautaire. Jasseries de Coleigne. Logette. Maison paysanne. Montagne communale. Montagne en copropriété. Montagne pastorale. Organisation paysanne de l'estive. Participation à l'ordre. Pastoralisme forézien. Patères. Troupeaux séparés. Usage de la montagne. Vacher. Vaches des monts du Forez. Veillées. Villages des hauts des monts du Forez.
(d) Voir aussi Alimentation en eau des jasseries d'altitude. Burons de la Richarde. Fromage. Frontière Forez-Auvergne. Jasseries de la Goutte de l'Oule.
(e) Parmi les randonnées photographiques sur les Hauts des monts du Forez :
- "L'Eau des Jasseries", à Garnier.
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Mis en ligne le Mercredi 23 Juillet 2008.
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