Du jas aux jasseries


En Forez.


(a) Autant que l'on puisse le supposer, à partir des rares documents, l'organisation paysanne de l'estive se dégage progressivement de règles communautaires pour aboutir à une gestion familiale avant de voir disparaître les jasseries. Le passage du terme jas au terme jasserie pourrait refléter cette lente évolution vers la propriété privée. Au départ, une coopération de forces musculaires a du être nécessaire pour creuser les premiers béals. C'est sur la ligne de niveau de celui-ci, légèrement en aval, que s'étirent les loges ou les burons. S'y ajoute un objectif individuel de bonification d'une parcelle de terrain, pour améliorer l'herbage familial. Car les fumées sont un produit de l'estive, presque au même titre que la fourme.


- <<Quelquefois sur les montagnes communales, toujours et beaucoup plus nettement là où la copropriété était jusqu'au partage ou est encore un fait bien établi, les "cabanes" auvergnates, les "loges" foréziennes sont bâties en ordre groupé. Alors que son dérivé "jasserie" désigne les constructions individuelles, c'est sans doute au groupe de jasseries qu'il faut relier le terme original de "jas", peu usité de nos jours, toujours employé semble-t-il, dans les anciens textes, pour désigner un groupe de bâtiments. Le jas est l'endroit où les bêtes s'arrêtent et s'abritent pour se reposer : c'est le sens général du verbe latin "jacere" - être couché, gésir - dont on retrouve la marque dans bien d'autres expressions foréziennes et la toponymie de toute la France méridionale. Aujourd'hui, les constructions d'une montagne en copropriété s'étalent le plus souvent sur une même ligne de niveau, à quelque 50 ou 100 mètres les unes des autres ; elles sont parfois, comme au Grand Genévrier (Saint-Anthème), mieux rassemblées. Cinq-cents mètres ou plus en prairies les séparent du fond du vallonnement. Ce ne sont pas toujours les points d'eau, malgré l'impérieuse nécessité de celle-ci, qui ont dicté l'emplacement d'un groupe de jasseries, puisqu'il arrive que l'eau soit amenée de plusieurs centaines de mètres, mais bien plutôt l'orientation sur un versant est ou sud de la montagne à laquelle sont rattachés les bâtiments. D'après les quelques documents que nous avons pu consulter, le groupement lâche d'aujourd'hui - du moins sur les montagnes en copropriété réelle, est l'aboutissement d'une évolution géographique partie d'une agglomération plus resserrée. A Coleigne, à la fin du XVII ème siècle, chaque construction appartient en privé à un propriétaire qui n'y abrite que son troupeau. Le terrain sur lequel reposent ces "loges" ou "cabanes" doit être considéré comme indivis puisqu'elles n'y sont pas installées définitivement : construites en bois, elles sont destinées à durer quelques années pour être ensuite détruites et rebâties ailleurs, "aux endroits qu'ils (les copropriétaires) jugeront le plus nécessaires pour bonifier et affranchir ladite montagne". On choisit en effet l'emplacement dans un but précis, l'amélioration du terrain par l'engrais animal : comme c'est encore la technique en usage aujourd'hui, la "graisse ou fumier" suit les rigoles tracées sur la partie du terrain choisie. Si l'on veut fertiliser une autre partie de la montagne, on déplace les loges. (Maurice Damon, "Les Jasseries des Monts du Forez")>>.


(b) A Renat et à Coleigne, deux montagnes de la paroisse de Sauvain, les vaches semblent avoir constitué des troupeaux groupés. Le 18 mai 1685, l'acte Desmier mentionne <<le troupeau de Colegny en leur particulier et celui de Reynat aussi en son particulier. (Acte Desmier)>>.


(c) Rien ne permet de dire si les moines de la Bénisson-Dieu furent les inventeurs de l'estive et du fromage de Roche. Vers 1200, avec l'appui du comte Guy II de Forez, ils ont du participer à un mouvement plus général. L'Histoire prête aux moines tant de fromages et tant de défrichements qu'on se demanderait parfois si les paysans ont servi à quelque chose ! Mais il fallait être relativement riche et privilégié pour participer à ce mouvement, dès son origine. Ce fut souvent l'apanage de l'Eglise. Avec l'aide du seigneur ou du comte, elle pouvait mobiliser les corvées.


(d) Voir Alliances matrimoniales nobiliaires. Célibat des prêtres. Gourds des Aillères. Inhibition aux défrichements. Moulins monastiques. Le Partage de la Montagne de Roche. Partage de la Montagne de Sauvain. Robert de Turlande.




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Auteur.

Hubert Houdoy

Mis en ligne le Jeudi 24 Juillet 2008.



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